Tribunal judiciaire de Du Mans, le 13 juin 2025, n°25/00105
Tribunal judiciaire du Mans, ordonnance de référé du 13 juin 2025. Un bail commercial conclu en 2017 a donné lieu à un commandement de payer, puis à une assignation en acquisition de clause résolutoire, expulsion et paiement provisionnel. Les défenderesses n’ont ni comparu ni été représentées à l’audience de mai 2025, l’ordonnance devant « sera réputée contradictoire ». Entre l’assignation et les débats, les sommes réclamées ont été réglées, conduisant le bailleur à se désister des prétentions principales tout en maintenant ses demandes au titre des dépens et des frais irrépétibles.
La formation des référés a d’abord relevé que « Il convient tout d’abord de prendre en compte le désistement d’instance » relativement aux demandes principales. Elle a ensuite rappelé que « Par ailleurs, l’article 700 du code de procédure civile permet au juge d’ordonner à la partie perdante de compenser financièrement la partie gagnante ». S’ensuivent deux décisions accessoires : « CONSTATE le désistement d’instance » et condamnation de la défenderesse principale « aux entiers dépens comprenant le coût du commandement de payer et de l’acte de dénonciation », ainsi qu’au paiement de 2 000 euros « au titre de l’article 700 du code de procédure civile ». Le cœur du litige se déplace ainsi vers la question de la répartition des frais et de l’office du juge après un désistement motivé par un paiement.
I. La prise d’acte du désistement et la compétence résiduelle pour statuer sur les frais
A. Extinction de l’instance principale et maintien des accessoires Le juge des référés constate l’extinction du litige principal par l’effet du retrait procédural du demandeur. En retenant que « Il convient tout d’abord de prendre en compte le désistement d’instance », l’ordonnance entérine la disparition de l’instance sur le fond, conformément au régime classique du désistement, en référé comme au fond. La précision tirée du dispositif, « CONSTATE le désistement d’instance », confirme l’économie de la solution : l’action aux fins d’acquisition de la clause résolutoire, d’expulsion et de condamnation provisionnelle n’appelle plus de décision au fond.
L’extinction de l’instance n’empêche toutefois pas le juge de statuer sur les conséquences accessoires. La décision rappelle implicitement que les demandes relatives aux dépens et aux frais irrépétibles survivent à la disparition du principal. La mention procédurale « statuant publiquement, par décision réputée contradictoire et en premier ressort » assoit la régularité de la saisine et permet au juge d’exercer ses pouvoirs résiduels, malgré la défaillance des défenderesses, l’affaire ayant « sera réputée contradictoire ».
B. Fondement et justification de l’allocation des frais irrépétibles L’ordonnance expose, dans une formule pédagogique, la finalité de l’article 700 : « Par ailleurs, l’article 700 du code de procédure civile permet au juge d’ordonner à la partie perdante de compenser financièrement la partie gagnante ». Elle souligne la nature des frais pris en compte, « Cela inclut des frais tels que les honoraires d’avocat et d’autres dépenses engagées dans le cadre de la procédure », et motive spécialement le quantum en pointant la charge procédurale supportée par le demandeur : le dossier « a fait l’objet de trois renvois depuis le début de la procédure ».
La solution retenue s’inscrit dans cette logique. Le juge octroie une somme globale de 2 000 euros « au titre de l’article 700 du code de procédure civile ». Le caractère équitable et forfaitaire de l’allocation est justifié par l’intervention d’un conseil et la chronologie procédurale, tous éléments caractéristiques de l’appréciation souveraine des frais irrépétibles. La motivation répond ainsi aux exigences de lisibilité et s’abstient de toute automaticité.
II. La charge des dépens après désistement : la délicate articulation entre succombance et texte spécial
A. Le heurt entre la logique de la succombance et le régime du désistement L’ordonnance adopte une présentation tranchée : « Partie succombante », la défenderesse principale « sera condamnée aux dépens qui comprendront le coût du commandement de payer de 77,85 € et de l’acte de dénonciation ». La motivation assimile la situation née du paiement post-assignation à une forme de défaite procédurale justifiant la mise à la charge des dépens, selon la règle de principe de la succombance.
Ce choix appelle discussion au regard du régime spécifique du désistement. Traditionnellement, le désistement d’instance emporte, sauf accord contraire, prise en charge des dépens par le désistant, la logique étant que l’initiative de l’instance finalement abandonnée commande le paiement des frais nécessaires. La décision opte pour une lecture finaliste : le paiement intégral, intervenu tardivement, révèle l’imputabilité des frais à la défenderesse, appréciée comme « perdante » sur l’accessoire. Cette approche privilégie la causalité des coûts plutôt que la lettre stricte du mécanisme de retrait.
La tension est donc nette. L’affirmation d’une « Partie succombante » en contexte de désistement suggère un usage extensif de la faculté d’aménager les dépens lorsque l’équité le commande. La motivation tient toutefois en une courte formule, qui ne précise pas le fondement textuel d’un éventuel écart à la règle spéciale, ce qui interroge la robustesse de la solution en cas de critique.
B. Portée pratique, sélection du débiteur et sécurité des pratiques contentieuses Sur le plan pratique, la solution protège l’économie du contrat et la discipline des paiements. Le juge fait peser sur la défenderesse les effets financiers d’une régularisation tardive, évitant qu’un désistement motivé par un paiement postérieur ne prive le demandeur du remboursement des frais nécessaires. Cette orientation peut être perçue comme dissuasive des manœuvres dilatoires et conforme à l’objectif de bonne administration de la justice.
Deux précisions méritent cependant attention. D’abord, l’ordonnance ne condamne qu’une seule défenderesse « aux entiers dépens », alors que l’assignation visait deux entités. La sélection du débiteur des frais traduit une appréciation individualisée de la causalité des coûts et de la réalité des liens avec le commandement de payer. Elle est cohérente avec l’autonomie du lien d’instance envers chaque défendeur, mais gagnerait à être explicitée pour renforcer la prévisibilité.
Ensuite, l’économie de motivation sur les dépens contraste avec la pédagogie déployée pour l’article 700. Si la condamnation « aux entiers dépens comprenant le coût du commandement de payer et de l’acte de dénonciation » circonscrit précisément les postes, la justification de la dérogation implicite au régime usuel du désistement demeure ramassée. Une référence plus explicite aux critères d’équité et à la causalité des frais eût consolidé la sécurité des pratiques contentieuses.
En définitive, l’ordonnance opère un réglage pragmatique du contentieux des loyers commerciaux en référé. En prenant acte du retrait sur le principal et en assumant une allocation ferme des frais, elle conjugue efficacité et réparation mesurée. Le balancement entre la lettre du désistement et la logique de succombance est tranché en faveur d’une causalité des coûts, au prix d’une motivation brève sur les dépens, mais en cohérence avec la justification développée pour les frais irrépétibles.
Tribunal judiciaire du Mans, ordonnance de référé du 13 juin 2025. Un bail commercial conclu en 2017 a donné lieu à un commandement de payer, puis à une assignation en acquisition de clause résolutoire, expulsion et paiement provisionnel. Les défenderesses n’ont ni comparu ni été représentées à l’audience de mai 2025, l’ordonnance devant « sera réputée contradictoire ». Entre l’assignation et les débats, les sommes réclamées ont été réglées, conduisant le bailleur à se désister des prétentions principales tout en maintenant ses demandes au titre des dépens et des frais irrépétibles.
La formation des référés a d’abord relevé que « Il convient tout d’abord de prendre en compte le désistement d’instance » relativement aux demandes principales. Elle a ensuite rappelé que « Par ailleurs, l’article 700 du code de procédure civile permet au juge d’ordonner à la partie perdante de compenser financièrement la partie gagnante ». S’ensuivent deux décisions accessoires : « CONSTATE le désistement d’instance » et condamnation de la défenderesse principale « aux entiers dépens comprenant le coût du commandement de payer et de l’acte de dénonciation », ainsi qu’au paiement de 2 000 euros « au titre de l’article 700 du code de procédure civile ». Le cœur du litige se déplace ainsi vers la question de la répartition des frais et de l’office du juge après un désistement motivé par un paiement.
I. La prise d’acte du désistement et la compétence résiduelle pour statuer sur les frais
A. Extinction de l’instance principale et maintien des accessoires
Le juge des référés constate l’extinction du litige principal par l’effet du retrait procédural du demandeur. En retenant que « Il convient tout d’abord de prendre en compte le désistement d’instance », l’ordonnance entérine la disparition de l’instance sur le fond, conformément au régime classique du désistement, en référé comme au fond. La précision tirée du dispositif, « CONSTATE le désistement d’instance », confirme l’économie de la solution : l’action aux fins d’acquisition de la clause résolutoire, d’expulsion et de condamnation provisionnelle n’appelle plus de décision au fond.
L’extinction de l’instance n’empêche toutefois pas le juge de statuer sur les conséquences accessoires. La décision rappelle implicitement que les demandes relatives aux dépens et aux frais irrépétibles survivent à la disparition du principal. La mention procédurale « statuant publiquement, par décision réputée contradictoire et en premier ressort » assoit la régularité de la saisine et permet au juge d’exercer ses pouvoirs résiduels, malgré la défaillance des défenderesses, l’affaire ayant « sera réputée contradictoire ».
B. Fondement et justification de l’allocation des frais irrépétibles
L’ordonnance expose, dans une formule pédagogique, la finalité de l’article 700 : « Par ailleurs, l’article 700 du code de procédure civile permet au juge d’ordonner à la partie perdante de compenser financièrement la partie gagnante ». Elle souligne la nature des frais pris en compte, « Cela inclut des frais tels que les honoraires d’avocat et d’autres dépenses engagées dans le cadre de la procédure », et motive spécialement le quantum en pointant la charge procédurale supportée par le demandeur : le dossier « a fait l’objet de trois renvois depuis le début de la procédure ».
La solution retenue s’inscrit dans cette logique. Le juge octroie une somme globale de 2 000 euros « au titre de l’article 700 du code de procédure civile ». Le caractère équitable et forfaitaire de l’allocation est justifié par l’intervention d’un conseil et la chronologie procédurale, tous éléments caractéristiques de l’appréciation souveraine des frais irrépétibles. La motivation répond ainsi aux exigences de lisibilité et s’abstient de toute automaticité.
II. La charge des dépens après désistement : la délicate articulation entre succombance et texte spécial
A. Le heurt entre la logique de la succombance et le régime du désistement
L’ordonnance adopte une présentation tranchée : « Partie succombante », la défenderesse principale « sera condamnée aux dépens qui comprendront le coût du commandement de payer de 77,85 € et de l’acte de dénonciation ». La motivation assimile la situation née du paiement post-assignation à une forme de défaite procédurale justifiant la mise à la charge des dépens, selon la règle de principe de la succombance.
Ce choix appelle discussion au regard du régime spécifique du désistement. Traditionnellement, le désistement d’instance emporte, sauf accord contraire, prise en charge des dépens par le désistant, la logique étant que l’initiative de l’instance finalement abandonnée commande le paiement des frais nécessaires. La décision opte pour une lecture finaliste : le paiement intégral, intervenu tardivement, révèle l’imputabilité des frais à la défenderesse, appréciée comme « perdante » sur l’accessoire. Cette approche privilégie la causalité des coûts plutôt que la lettre stricte du mécanisme de retrait.
La tension est donc nette. L’affirmation d’une « Partie succombante » en contexte de désistement suggère un usage extensif de la faculté d’aménager les dépens lorsque l’équité le commande. La motivation tient toutefois en une courte formule, qui ne précise pas le fondement textuel d’un éventuel écart à la règle spéciale, ce qui interroge la robustesse de la solution en cas de critique.
B. Portée pratique, sélection du débiteur et sécurité des pratiques contentieuses
Sur le plan pratique, la solution protège l’économie du contrat et la discipline des paiements. Le juge fait peser sur la défenderesse les effets financiers d’une régularisation tardive, évitant qu’un désistement motivé par un paiement postérieur ne prive le demandeur du remboursement des frais nécessaires. Cette orientation peut être perçue comme dissuasive des manœuvres dilatoires et conforme à l’objectif de bonne administration de la justice.
Deux précisions méritent cependant attention. D’abord, l’ordonnance ne condamne qu’une seule défenderesse « aux entiers dépens », alors que l’assignation visait deux entités. La sélection du débiteur des frais traduit une appréciation individualisée de la causalité des coûts et de la réalité des liens avec le commandement de payer. Elle est cohérente avec l’autonomie du lien d’instance envers chaque défendeur, mais gagnerait à être explicitée pour renforcer la prévisibilité.
Ensuite, l’économie de motivation sur les dépens contraste avec la pédagogie déployée pour l’article 700. Si la condamnation « aux entiers dépens comprenant le coût du commandement de payer et de l’acte de dénonciation » circonscrit précisément les postes, la justification de la dérogation implicite au régime usuel du désistement demeure ramassée. Une référence plus explicite aux critères d’équité et à la causalité des frais eût consolidé la sécurité des pratiques contentieuses.
En définitive, l’ordonnance opère un réglage pragmatique du contentieux des loyers commerciaux en référé. En prenant acte du retrait sur le principal et en assumant une allocation ferme des frais, elle conjugue efficacité et réparation mesurée. Le balancement entre la lettre du désistement et la logique de succombance est tranché en faveur d’une causalité des coûts, au prix d’une motivation brève sur les dépens, mais en cohérence avec la justification développée pour les frais irrépétibles.