Cour d’appel de Metz, le 9 septembre 2025, n°18/01869

La Cour d’appel de Metz, 9 septembre 2025, statue sur un contentieux de voisinage portant sur l’empiétement d’un escalier édifié lors d’opérations immobilières successives ayant mêlé divisions foncières, ventes en lots et institution d’une servitude de passage. Des ventes et un règlement de copropriété avaient été reçus en 2004, la servitude répondant aux préconisations d’un permis de construire. L’escalier desservant l’immeuble voisin fut ensuite reproché d’empiéter sur la parcelle contiguë.

Saisie en 2009, la juridiction de première instance ordonna en 2018 la démolition avec astreinte, alloua des dommages et intérêts, et prononça diverses garanties contre les intervenants techniques et le vendeur. Deux appels furent interjetés. En cours d’instance, l’immeuble objet du litige fut cédé à un nouvel acquéreur, qui intervint volontairement. Un accord transactionnel global fut conclu le 20 juin 2025, prévoyant renonciations, versements, cessions réelles croisées et servitudes, les parties sollicitant son homologation et l’annexion de la convention à l’arrêt.

La question posée tenait à la portée et aux modalités de l’homologation transactionnelle en appel, au regard du pouvoir juridictionnel de donner force exécutoire à un accord mettant fin au litige, et de ses effets sur le jugement entrepris. La cour répond en retenant que « En application de l’article 384 alinéa 3 du code de procédure civile, il appartient au juge de donner force exécutoire à l’acte constatant l’accord entre les parties. » Elle annule l’économie de la décision initiale, constate les désistements, et sécurise l’exécution des stipulations transactionnelles, en particulier les engagements réels. Le dispositif en porte la trace, relevant notamment « Vu l’accord transactionnel en date du 20 juin 2025, » puis « Infirme le jugement rendu le 4 mai 2018 par le tribunal de grande instance de Sarreguemines ; » et enfin « Dit que chaque partie supportera la charge de ses propres frais et dépens de première instance et d’appel ; ».

I. L’homologation transactionnelle en appel, sens et mise en œuvre

A. Le fondement textuel et la fonction juridictionnelle

La cour s’appuie sur un texte procédural qui attribue au juge un pouvoir d’exequatur appliqué aux accords mettant fin au litige. L’attendu de principe, bref et explicite, fonde la compétence pour transposer dans l’ordre exécutoire un acte négocié. Le rappel de l’article du code de procédure civile érige l’homologation en instrument de pacification du procès, distinct de la simple « prise d’acte » et accordant à l’écrit transactionnel la force d’un titre.

La formulation retenue circonscrit le contrôle au périmètre nécessaire, sans excéder un examen de régularité et de licéité apparente. L’économie du motif évite toute appréciation intrusive du contenu substantiel de l’accord, ce qui respecte la logique des articles du code civil qui confèrent à la transaction autorité entre parties, sous réserve d’un ancrage exécutoire pour l’exécution forcée. Le cœur du raisonnement se concentre sur l’aptitude de l’écrit à terminer l’instance et à produire effet exécutoire.

B. Les effets procéduraux attachés à l’homologation en degré d’appel

L’homologation se combine ici avec une infirmation, des désistements et l’annexion intégrale du protocole, afin d’assainir l’ensemble procédural. L’énoncé « Infirme le jugement rendu le 4 mai 2018 par le tribunal de grande instance de Sarreguemines ; » neutralise les condamnations incompatibles avec la paix négociée, ce qui évite la coexistence de titres contraires. La prise d’acte des désistements purge les prétentions résiduelles et éteint l’instance.

Le choix de l’infirmation, plutôt qu’une simple constatation d’extinction, assure une cohérence lisible entre le dispositif et le titre transactionnel annexé. La solution prévient tout risque d’exécution concurrente du jugement initial et clarifie la chaîne des titres opposables. La mention « Vu l’accord transactionnel en date du 20 juin 2025, » inscrit la convention au centre du dispositif, lui conférant une portée opératoire immédiate.

II. Valeur de la solution et portée pratique

A. Une méthode conforme au droit positif et protectrice de la sécurité juridique

La décision articule utilement la logique transactionnelle et la rigueur des effets procéduraux. Le rappel du texte procédural s’accorde avec le régime substantiel des transactions, tandis que l’annexion de la convention renforce l’intelligibilité pour les tiers et les opérateurs du foncier. Le segment final « Dit que chaque partie supportera la charge de ses propres frais et dépens de première instance et d’appel ; » parachève l’équilibre, en cohérence avec l’absence de vainqueur juridictionnel.

Cette méthode peut surprendre par le cumul d’une infirmation et de désistements, mais elle prévient les ambiguïtés d’une pure extinction d’instance qui laisserait survivre un jugement condamnant. L’option retenue protège les parties contre toute exécution résiduelle et favorise la lisibilité de la situation exécutoire. Elle respecte enfin la liberté transactionnelle, aucun élément illicite ou contraire à l’ordre public n’étant relevé.

B. Une portée opérationnelle marquée en matière immobilière et de voisinage

La cour confère une force singulière à un protocole structurant des cessions réelles, des servitudes et des engagements d’entretien, éléments décisifs en droit des biens. L’homologation confère unité et opposabilité à un réglage fin des limites et usages, là où une injonction de démolition eût nourri un contentieux de suite. La conversion du litige en architecture conventionnelle exécutoire s’avère ici économiquement rationnelle.

La pratique ainsi consolidée favorise les solutions sur mesure en copropriété et voisinage, en combinant désencombrement du rôle et sécurité des droits. Elle incite les professionnels à documenter précisément l’assiette, l’arpentage et les esquisses volumétriques, le juge offrant la clef d’exécution. La portée de l’arrêt tient donc à la validation d’un outillage procédural complet, capable de transformer un conflit d’empiétement en reconfiguration pacifiée des rapports réels.

Source : Cour de cassation – Base Open Data « Judilibre » & « Légifrance ».

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