Le Conseil constitutionnel a rendu le 26 juin 2003 une décision portant sur la conformité à la Constitution de la loi relative à l’urbanisme et à l’habitat. Cette décision intervient dans un contexte de réforme de l’intercommunalité visant à assouplir les règles de retrait pour certaines catégories de membres. L’article 64 de ce texte prévoyait la possibilité pour certaines communes de se retirer d’une communauté d’agglomération pour adhérer à un autre groupement. Les requérants critiquaient tant la procédure d’adoption de cette disposition par voie d’amendement que son éventuelle contrariété avec le principe d’égalité entre les collectivités. Le juge constitutionnel rejette ces griefs en soulignant le lien entre l’organisation de l’intercommunalité et les compétences exercées par ces groupements en matière d’habitat. L’étude de cette décision porte d’abord sur la validation de la procédure législative avant d’envisager l’examen du respect du principe d’égalité.
I. La reconnaissance d’un lien suffisant entre l’amendement et l’objet de la loi
A. L’encadrement constitutionnel du droit d’amendement
Le droit d’amendement est une prérogative parlementaire protégée par les articles 39, 44 et 45 de la Constitution française. Toutefois, les modifications apportées ne doivent pas être « dépourvues de tout lien avec l’objet du projet ou de la proposition » initialement soumis. Cette exigence vise à garantir la clarté et la sincérité des débats en évitant l’insertion de dispositions totalement étrangères au texte. Le Conseil constitutionnel rappelle ici que ce droit s’exerce à chaque stade de la procédure sous réserve des limites liées à la commission mixte paritaire.
B. L’appréciation concrète du lien avec les politiques d’urbanisme
Le juge relève que les communautés d’agglomération exercent des compétences obligatoires en matière « d’aménagement de l’espace communautaire » et « d’équilibre social de l’habitat ». Dès lors, une disposition modifiant le périmètre de ces structures présente nécessairement un lien avec un projet de loi traitant d’urbanisme. L’appréciation libérale de ce lien permet de sécuriser les réformes territoriales complexes souvent enrichies lors de la discussion parlementaire. Cette approche pragmatique écarte la qualification de cavalier législatif pour l’article 64 qui s’intègre parfaitement dans l’économie générale du texte.
La régularité procédurale de l’article 64 étant ainsi établie par le juge, il convient d’analyser la solidité du grief portant sur l’égalité.
II. La consécration d’une différence de situation justifiant la dérogation à l’égalité
A. La flexibilité du principe d’égalité devant les catégories juridiques
Le principe d’égalité n’interdit pas au législateur de « régler de façon différente des situations différentes » pour des motifs d’intérêt général. La différence de traitement doit cependant être « en rapport direct avec l’objet de la loi » pour être jugée constitutionnelle. Le juge vérifie ici si le critère retenu par le Parlement repose sur une distinction objectivement identifiable au sein des collectivités. Cette jurisprudence classique permet d’adapter le droit aux réalités locales sans pour autant créer de privilèges injustifiés ou arbitraires.
B. La protection des communes intégrées sans consentement préalable
La faculté de retrait est réservée aux seules communes « attraites sans leur accord dans le périmètre d’une communauté d’agglomération existante ». Cette situation particulière justifie une procédure dérogatoire par rapport aux membres ayant volontairement adhéré au projet commun de développement urbain. En validant ce dispositif, le Conseil constitutionnel reconnaît la légitimité d’une correction législative destinée à restaurer la liberté de choix des communes. La décision confirme ainsi que l’absence de consentement initial constitue une différence de situation pertinente autorisant un traitement juridique spécifique.