Tribunal judiciaire de Paris, le 20 juin 2025, n°25/50577

Le désistement d’instance et d’action constitue un mode d’extinction du procès qui met fin au litige sans que le juge se prononce au fond. L’ordonnance rendue par le Tribunal judiciaire de Paris le 20 juin 2025 illustre ce mécanisme procédural dans le cadre d’une instance en référé.

Une société avait assigné en référé une autre société devant le Tribunal judiciaire de Paris par acte du 17 janvier 2025. À l’audience du 20 juin 2025, la demanderesse s’est désistée de son instance et de son action. La défenderesse a accepté ce désistement par message RPVA du 19 juin 2025.

Le juge des référés a constaté le désistement de la demanderesse, l’a déclaré parfait, a constaté l’extinction de l’instance et le dessaisissement de la juridiction. Les dépens devaient être recouvrés conformément à l’article 399 du code de procédure civile, sauf accord contraire des parties.

La question de droit soulevée par cette ordonnance est celle des conditions de perfection du désistement d’instance et d’action ainsi que de ses effets sur l’instance et sur le droit d’agir.

Le juge a considéré que « le désistement étant parfait, il convient de constater le dessaisissement de la juridiction ». Il a ainsi constaté l’extinction de l’instance après avoir déclaré le désistement parfait en raison de l’acceptation expresse de la défenderesse.

Cette ordonnance invite à examiner les conditions de perfection du désistement (I), avant d’analyser les effets de ce désistement sur l’instance et sur le droit d’agir (II).

I. Les conditions de perfection du désistement

Le désistement suppose la réunion de conditions tenant à la manifestation de volonté du demandeur (A) et à l’acceptation du défendeur lorsqu’elle est requise (B).

A. La manifestation de volonté de se désister

Le désistement d’instance est l’acte par lequel le demandeur renonce à poursuivre l’instance qu’il a engagée. L’article 394 du code de procédure civile dispose que « le demandeur peut, en toute matière, se désister de sa demande en vue de mettre fin à l’instance ». Cette faculté appartient au demandeur qui, ayant pris l’initiative du procès, conserve la maîtrise de son action.

En l’espèce, la demanderesse « se désiste de son instance et de son action » à l’audience du 20 juin 2025. Cette formulation révèle une double volonté. La société renonce non seulement à la poursuite de l’instance en cours, mais également à son droit d’agir. Le désistement d’action, prévu par l’article 384 du code de procédure civile, emporte renonciation au droit d’action lui-même. Il s’agit d’un acte de disposition qui prive son auteur de la possibilité de réintroduire ultérieurement la même demande.

B. L’acceptation du défendeur

L’article 395 du code de procédure civile subordonne la perfection du désistement à l’acceptation du défendeur lorsque celui-ci a présenté une défense au fond ou une fin de non-recevoir. L’acceptation peut être expresse ou tacite. L’acceptation expresse résulte d’une manifestation de volonté non équivoque du défendeur.

L’ordonnance mentionne que « la société […] a accepté le désistement par message RPVA en date du 19 juin 2025 ». Cette acceptation intervient donc par voie électronique, au moyen du réseau privé virtuel des avocats. Elle précède l’audience d’un jour, ce qui démontre que le défendeur ne s’oppose pas à la fin de l’instance. Le juge en déduit que « le désistement étant parfait », la juridiction doit constater son dessaisissement. La perfection du désistement résulte ainsi de la rencontre des volontés des parties.

II. Les effets du désistement sur l’instance et sur le droit d’agir

Le désistement parfait produit des effets sur l’instance en cours (A) et, lorsqu’il porte sur l’action, sur le droit d’agir lui-même (B).

A. L’extinction de l’instance et le dessaisissement du juge

Le désistement d’instance emporte extinction de l’instance. L’article 385 du code de procédure civile prévoit que l’instance s’éteint notamment par l’effet du désistement. Cette extinction entraîne le dessaisissement de la juridiction, qui ne peut plus statuer sur le fond du litige.

Le juge constate « l’extinction de l’instance et le dessaisissement de la juridiction ». Son rôle se limite à prendre acte de la volonté concordante des parties. Il ne statue pas sur le bien-fondé de la demande originaire. L’ordonnance prononce également sur les dépens, conformément à l’article 399 du code de procédure civile qui prévoit que le demandeur qui se désiste supporte les frais de l’instance, sauf convention contraire. Cette règle traduit l’idée que celui qui renonce à son action doit en assumer les conséquences financières.

B. La portée du désistement d’action

Le désistement d’action se distingue du simple désistement d’instance par son effet définitif sur le droit d’agir. L’article 384 du code de procédure civile dispose que le désistement d’action emporte extinction de l’action. Le demandeur renonce à son droit substantiel d’agir en justice pour faire valoir la prétention qu’il avait initialement formée.

En l’espèce, la demanderesse se désiste « de son instance et de son action ». Cette double renonciation présente un caractère irrévocable. La société ne pourra pas réintroduire ultérieurement la même demande contre le même défendeur. Cette solution se justifie par la sécurité juridique. Le défendeur qui accepte un tel désistement est fondé à considérer que le litige est définitivement clos. L’ordonnance ne précise pas les motifs qui ont conduit la demanderesse à renoncer à son action. Cette absence de motivation n’affecte pas la validité du désistement, le juge n’ayant pas à contrôler les raisons qui président au choix des parties de mettre fin au procès.

Source : Cour de cassation – Base Open Data « Judilibre » & « Légifrance ».

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