La Cour de justice de l’Union européenne, par une décision rendue le 2025, précise l’interprétation de la directive relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée. Le litige porte sur l’application d’un taux réduit aux services d’hébergement hôtelier fournis sans certificat de classement administratif valide. Une société de droit national gérait un complexe d’appartements et appliquait le taux réduit de neuf pour cent sur ses prestations. L’administration fiscale a procédé à un redressement au taux normal de vingt pour cent après l’expiration du certificat de classement de l’établissement. La juridiction administrative de premier ressort a annulé ce redressement en privilégiant la nature réelle de l’activité sur les formalités administratives. Saisie en cassation, la Cour administrative suprême a interrogé la juridiction européenne sur la conformité de cette exigence nationale de classement. La Cour de justice affirme que le droit de l’Union s’oppose à une telle condition si elle méconnaît le principe de neutralité fiscale.
I. L’encadrement de l’application sélective du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée
A. La faculté de limiter le taux réduit à des aspects concrets et spécifiques
La directive permet aux États membres d’appliquer des taux réduits à certaines catégories de prestations mentionnées de manière exhaustive par le texte européen. La Cour rappelle que « l’application d’un ou de deux taux réduits n’est pas obligatoire » mais constitue une simple faculté dérogatoire. Les autorités nationales disposent d’une marge d’appréciation pour définir les critères appropriés distinguant les opérations taxables de celles qui sont exonérées. Cette liberté permet de restreindre l’avantage fiscal à des « aspects concrets et spécifiques » de la catégorie de services concernée. L’hébergement en hôtel peut donc faire l’objet d’un ciblage précis selon les objectifs de politique économique de l’État. Cette sélection demeure toutefois subordonnée à l’identification claire d’une prestation distincte au sein de la catégorie générale.
B. L’exigence d’une prestation identifiable séparément au sein d’une catégorie
Pour isoler un aspect spécifique, la prestation doit être « identifiable, en tant que telle, séparément des autres prestations de cette catégorie ». En l’espèce, le droit national impose le classement à tous les établissements hôteliers pour l’exercice légal de leur activité économique. Si tous les prestataires sont soumis à la même obligation, l’hébergement classé ne constitue pas un aspect distinct des autres services d’hébergement. La réglementation couvre en réalité l’ensemble des prestations de la catégorie sans opérer de distinction réelle entre différents types de services. Un hébergement non conforme à la législation nationale reste, au sens fiscal, une opération relevant du secteur hôtelier général. L’application du taux normal ne peut se justifier par la seule absence d’un certificat si l’activité demeure intrinsèquement identique.
II. La soumission de la réglementation nationale au principe de neutralité fiscale
A. L’appréciation de la similitude des prestations par le consommateur moyen
Le principe de neutralité fiscale interdit de traiter différemment des prestations de services semblables qui se trouvent en concurrence entre elles. Cette similitude s’apprécie selon le point de vue du consommateur moyen pour vérifier si les services répondent aux mêmes besoins. La Cour souligne que « le classement d’un établissement par les autorités nationales est, en principe, susceptible de fournir une garantie » de qualité. Toutefois, d’autres éléments comme les notations en ligne ou les photographies peuvent influencer plus fortement le choix final du client. Si les différences entre un établissement classé et un autre non classé n’impactent pas la décision du consommateur, l’égalité de traitement fiscal s’impose. La réalité de la prestation perçue par l’usager prime alors sur les labels administratifs pour déterminer le taux de taxe applicable.
B. L’indifférence relative des manquements administratifs sur la qualification fiscale
Le respect des règles de taxe sur la valeur ajoutée doit prévenir toute fraude sans pour autant sanctionner de simples retards administratifs. La société prestataire avait entamé les démarches de renouvellement bien avant l’expiration de son certificat initial sans obtenir de réponse rapide. Le juge européen relève que l’activité est restée stable et que les recettes étaient dûment comptabilisées auprès de l’administration fiscale nationale. Le principe de neutralité fiscale « s’oppose, en matière de perception de la TVA, à une différenciation généralisée entre les transactions illicites et les transactions licites ». Un manquement aux règles de la police du tourisme ne doit pas entraîner automatiquement une requalification fiscale pénalisante. L’absence de certificat de classement ne suffit pas à exclure le bénéfice du taux réduit si la neutralité fiscale est compromise.