Par un arrêt rendu le 21 mai 2025, la cour administrative d’appel de Douai précise les conditions de régularisation de la capacité pour agir d’un maire. Le litige portait initialement sur la réparation de désordres affectant le système de chauffage et la cuve à fioul d’un groupe scolaire communal. Saisi en première instance, le tribunal administratif d’Amiens avait rejeté la demande indemnitaire en raison d’un défaut d’habilitation du maire pour agir au nom de la collectivité. La commune soutenait pourtant disposer d’une délégation régulière, bien que les documents produits devant les premiers juges aient été jugés tardifs ou obsolètes. La juridiction d’appel devait alors déterminer si une délibération prise durant un précédent mandat ou une production tardive de pièces pouvaient couvrir l’irrecevabilité initiale. Le juge administratif confirme que la fin du mandat municipal entraîne la caducité des délégations et que la régularisation en appel d’une telle omission s’avère impossible.
I. L’exigence d’une habilitation en vigueur pour ester en justice
A. La caducité de la délégation consentie lors du précédent mandat
L’article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales prévoit que le maire peut être chargé d’intenter les actions au nom de sa commune. Cette compétence déléguée par le conseil municipal est strictement limitée, selon les termes de la loi, « pour la durée de son mandat ». En l’espèce, la commune requérante se prévalait d’une délibération adoptée le 28 mars 2014 pour justifier la qualité de son représentant. Or, l’action indemnitaire n’a été introduite devant le tribunal administratif que le 9 août 2021, soit après le renouvellement intégral des instances municipales. La cour administrative d’appel de Douai souligne qu’« une telle délibération avait cessé de produire ses effets à la fin du mandat du maire survenu en 2020 ». Elle n’était donc plus susceptible de fonder légalement le pouvoir du maire pour saisir la juridiction lors de l’introduction de l’instance.
B. La persistance du défaut de qualité pour agir en première instance
Le respect du contradictoire oblige le juge à solliciter la régularisation d’une requête lorsque la qualité du signataire est contestée par une partie adverse. Dans cette affaire, le tribunal administratif avait invité la collectivité à produire les éléments justifiant l’habilitation de son maire avant la clôture de l’instruction. La commune s’était pourtant bornée à transmettre une nouvelle fois le document obsolète de 2014, ignorant ainsi l’invitation précise du juge de première instance. Bien qu’une délibération valide ait été finalement transmise, cette production est intervenue après l’expiration du délai imparti par la mesure d’instruction ordonnée par le tribunal. La cour administrative d’appel considère souverainement que « rien ne faisait obstacle à ce que la commune régularise sa demande avant la clôture de l’instruction ». Ce manquement procédural cristallise l’irrecevabilité de la demande au moment où les premiers juges statuent sur le bien-fondé des prétentions présentées.
La constatation de cette carence devant le tribunal administratif conditionne l’issue de la procédure d’appel, rendant toute tentative de régularisation ultérieure parfaitement inopérante.
II. L’inefficacité de la régularisation tardive de l’irrecevabilité
A. La portée de la clôture de l’instruction sur la production des preuves
La procédure administrative contentieuse est gouvernée par le principe de la clôture de l’instruction, qui fige les éléments sur lesquels le juge fonde sa décision. En l’espèce, la délibération pertinente du 29 septembre 2020 n’a été communiquée au greffe que trois jours francs avant l’audience publique de première instance. Le tribunal administratif n’était pas tenu de rouvrir l’instruction pour examiner cette pièce, dès lors que la partie avait disposé de délais suffisants pour agir. La cour administrative d’appel de Douai valide cette position en rappelant que le juge dispose d’un pouvoir d’appréciation quant à l’opportunité de réouvrir les débats. Le respect des délais de production constitue une garantie essentielle pour la sécurité juridique des parties et pour la bonne administration de la justice. Cette rigueur temporelle empêche ainsi les plaideurs de pallier leur négligence initiale par l’envoi de documents essentiels juste avant le prononcé du jugement.
B. L’impossibilité de régulariser l’instance initiale devant le juge d’appel
La production en cause d’appel d’une délibération régulière ne permet pas de couvrir rétroactivement l’absence d’habilitation constatée par le juge de premier ressort. L’arrêt affirme que « la production de la délibération devant la cour n’est pas de nature à régulariser la demande présentée devant le tribunal administratif ». Cette solution protège la structure même du double degré de juridiction en évitant que l’appel ne devienne un simple prolongement de l’instruction initiale. L’irrecevabilité, lorsqu’elle est opposée régulièrement et qu’aucune régularisation n’intervient dans les délais prescrits, devient définitive pour l’instance concernée par le jugement attaqué. Le juge d’appel se borne à vérifier si le premier juge a fait une exacte application des règles de procédure au jour de sa décision. Par conséquent, la requête est rejetée sans que la cour n’ait besoin d’examiner le fond du droit relatif aux désordres techniques de l’ouvrage.