Tribunal judiciaire de Chartres, le 16 juin 2025, n°25/00099

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Par ordonnance de référé rendue par le Tribunal judiciaire de Chartres le 16 juin 2025, des acquéreurs d’un immeuble sollicitaient, sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, la désignation d’un expert. Les vendeurs s’opposaient à cette mesure, contestant l’existence d’un motif légitime et réclamant une indemnité au titre de l’article 700. Les faits utiles tiennent à la découverte, lors de travaux postérieurs à la vente, de fissures traversantes, d’une fragilité de charpente et d’infiltrations, corroborées par un constat et un diagnostic technique. La procédure a consisté en une assignation en référé aux fins d’expertise préventive, une contestation de la part adverse et un débat contradictoire. La question posée tenait à la caractérisation du « motif légitime » et à la délimitation du contrôle du juge des référés, d’une part, puis au régime des dépens et de l’article 700 en cas d’expertise ordonnée sur ce fondement, d’autre part. Le juge retient que « s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées », et qu’« il n’appartient pas au juge des référés (…) d’apprécier la pertinence de l’argumentation relative aux critères de mise en œuvre de la garantie des vices cachés ». L’expertise est ordonnée, la provision mise à la charge des demandeurs, et « la partie défenderesse (…) ne peut être considérée comme la partie perdante au sens des articles 696 et 700 ».

I. Le cadre de l’article 145 et son application à l’espèce

A. L’exigence d’un litige potentiel et d’un motif légitime objectivé
Le juge rappelle la double condition, en précisant que « la première est suffisamment caractérisée dès lors que le demandeur précise en quoi les parties sont en désaccord ». Il ajoute que « la seconde est présumée, sauf au défendeur à démontrer que l’action au fond serait vouée à l’échec ». La motivation articule alors les pièces produites, notamment le constat et le diagnostic chiffrant les reprises, pour établir un désaccord sérieux et des éléments techniques vérifiables. La référence à ces éléments concrets confère au motif légitime une assise probatoire suffisante et écarte toute démarche exploratoire abstraite.

B. La nécessité de la mesure et la neutralité du contrôle juridictionnel
La décision souligne que le litige « revêt des aspects techniques qui nécessitent le recours » à l’expertise et que la mesure « apparaît nécessaire, notamment pour connaître l’origine des désordres constatés ». Elle circonscrit le contrôle en affirmant qu’« il n’appartient pas au juge des référés (…) d’apprécier » le bien‑fondé d’une garantie des vices cachés. Cette réserve préserve la finalité probatoire de l’article 145, dont la fonction demeure instrumentale. L’ordonnance ménage ainsi la proportionnalité de la mesure, en calibrant une mission tournée vers les causes, l’étendue des désordres et le chiffrage, sans préjuger des responsabilités ni de la qualification juridique.

II. Les incidences procédurales et financières de l’expertise ordonnée

A. Le statut procédural des défendeurs et l’exclusion de la qualité de « perdant »
S’agissant des frais, la décision rappelle que « la partie défenderesse à une demande d’expertise ordonnée sur le fondement de l’article 145 (…) ne peut être considérée comme la partie perdante ». Cette solution, conforme à la jurisprudence, distingue l’ordonnance probatoire de toute décision au fond. Elle justifie que la provision pour expertise soit supportée par les demandeurs, que les dépens leur soient mis à charge solidaire et qu’aucune indemnité ne soit allouée sur le fondement de l’article 700. L’économie générale respecte l’idée d’une mesure d’instruction préparatoire, étrangère à la logique victorieuse ou débitrice.

B. Portée pratique et équilibre entre droit à la preuve et prévention des dérives
L’ordonnance illustre une mise en œuvre équilibrée du droit à la preuve, en retenant des indices précis et contemporains pour fonder la mesure. La présomption de motif légitime, renversable par la démonstration d’une action vouée à l’échec, évite les expertises de confort en l’absence d’éléments sérieux. L’encadrement de la mission, centré sur l’origine, l’ampleur et le coût des corrections, garantit l’utilité de la mesure et structure le débat futur. La solution clarifie la frontière entre instruction probatoire et examen du fond, ce qui favorise une instruction efficace sans confondre la notion de vice caché avec les conditions de l’article 145.

Source : Cour de cassation – Base Open Data « Judilibre » & « Légifrance ».

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