Par un arrêt rendu le 10 juillet 2025, la Cour administrative d’appel de Paris précise les conditions de régularisation d’un permis de construire entaché d’un vice documentaire. Un pétitionnaire a obtenu une autorisation pour transformer des locaux artisanaux en bureaux et combler une courette au sein d’un ensemble immobilier situé à Paris. Le tribunal administratif de Paris a d’abord annulé partiellement cet arrêté le 4 novembre 2022 en raison d’une insuffisance documentaire relative à la réglementation thermique. Saisie en appel, la juridiction de second degré a rendu un arrêt avant dire droit le 2 octobre 2024 sur le fondement de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme. Elle a retenu qu’aucune pièce du dossier initial ne faisait apparaître deux ouvertures existantes sur le mur pignon de l’immeuble voisin immédiat du projet. Le juge a ainsi imparti un délai de six mois au bénéficiaire de l’acte pour justifier de l’intervention d’une mesure de régularisation de ce vice. Un permis de construire modificatif a été délivré le 21 mars 2025 après le dépôt de nouveaux plans de coupe intégrant les fenêtres litigieuses. La société voisine conteste toutefois la validité de cette régularisation en invoquant des erreurs persistantes de positionnement et l’absence de représentation du barreaudage des ouvertures. Le juge administratif doit déterminer si des imprécisions graphiques mineures portant sur des éléments préexistants vicient la régularisation d’une autorisation d’urbanisme dont l’impact est connu.
I. La mise en œuvre d’une régularisation juridictionnelle différée
A. L’usage impératif de la technique du sursis à statuer
L’arrêt du 10 juillet 2025 s’inscrit dans la phase finale d’une procédure de régularisation engagée par l’arrêt avant dire droit rendu par la même cour. En application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, le juge a suspendu sa décision finale pour permettre au pétitionnaire de corriger l’illégalité identifiée. Cette disposition impose au juge de permettre la régularisation lorsqu’un vice de forme ou de procédure peut être couvert par un permis modificatif en cours d’instance. Le vice initial consistait en une méconnaissance de l’article R. 431-10 du code de l’urbanisme, faute de documents graphiques montrant l’insertion précise du projet. L’autorité juridictionnelle a estimé que l’absence de mention des fenêtres du mur pignon voisin empêchait l’administration d’apprécier correctement l’impact visuel et architectural des travaux. Cette première phase démontre la volonté du législateur de privilégier la stabilité des projets immobiliers en évitant des annulations totales pour des erreurs purement documentaires.
B. La matérialisation de l’état existant par le permis modificatif
Pour satisfaire aux exigences de l’arrêt avant dire droit, le pétitionnaire a produit un plan de coupe actualisé lors de sa demande de permis modificatif. Ce document représente désormais l’état existant de l’immeuble avec les deux fenêtres sur le mur pignon ainsi que leur obstruction future par le comblement projeté. La cour souligne que « l’autorité administrative avait connaissance de la présence de ces deux fenêtres et de leur future obstruction » grâce à ces nouvelles pièces. La régularisation est donc effective dès lors que le dossier contient les éléments d’information dont l’absence avait été initialement sanctionnée par le juge d’appel. Cette mise en conformité du dossier architectural permet de rétablir la légalité de la procédure d’instruction en offrant une vision complète du terrain et des avoisinants. L’administration a ainsi pu se prononcer en pleine connaissance de cause sur la conformité du projet à la réglementation d’urbanisme applicable dans la zone.
II. Le caractère inopérant des inexactitudes graphiques mineures
A. Le critère de l’appréciation faussée de l’autorité administrative
La requérante soutenait que le positionnement des fenêtres sur les nouveaux plans restait erroné de quelques centimètres et déplorait l’absence de représentation des barreaudages. La juridiction administrative rejette cette argumentation en rappelant une jurisprudence constante relative à la complétude des dossiers de demande de permis de construire. Le défaut de pièces ou l’imprécision des documents n’entraîne l’illégalité de l’acte que s’ils ont « été de nature à fausser l’appréciation portée par l’autorité administrative ». Ce principe de l’erreur non déterminante permet de distinguer les lacunes substantielles des simples imperfections techniques n’ayant aucune incidence sur le sens de la décision. En l’espèce, la connaissance par la mairie de l’existence même des ouvertures et de leur comblement futur suffisait à éclairer parfaitement le choix de l’administration. La cour écarte les critiques sur le positionnement millimétrique des fenêtres car elles n’apportent aucun élément nouveau susceptible de modifier l’analyse de l’insertion du projet.
B. La confirmation de la validité de l’autorisation d’urbanisme globale
Le juge conclut que le vice retenu initialement a été valablement régularisé par l’arrêté de permis de construire modificatif délivré le 21 mars 2025. Dès lors que la requérante ne soulève aucun vice propre contre cet acte de régularisation, l’ensemble des conclusions dirigées contre le projet est rejeté. L’arrêt confirme que la régularisation opère une jonction avec le permis initial, formant ainsi un ensemble juridique cohérent et purgé de ses défauts de procédure. La solution retenue par la Cour administrative d’appel de Paris illustre une application pragmatique du droit de l’urbanisme centrée sur l’information essentielle de l’administration. En refusant de sanctionner des erreurs de détail sans influence sur le fond, le juge assure l’équilibre entre la protection des tiers et la sécurité juridique. L’arrêt rejette finalement l’appel contre le jugement du tribunal administratif de Paris, validant ainsi définitivement la transformation des locaux et les modifications de l’aspect extérieur.