Cour d’appel de Paris, le 1 juillet 2025, n°23/12297

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Rendue par la Cour d’appel de Paris le 1er juillet 2025, la décision tranche un contentieux locatif portant principalement sur la majoration du loyer via des travaux d’amélioration dans un secteur soumis au plafonnement. Des demandes accessoires visaient la présence de plomb dégradé, la régularisation des charges, une panne partielle de chauffage et l’immobilisation des ascenseurs, chacune appréciée au regard de leur preuve et de leur portée concrète.

Les faits tiennent à la conclusion d’un bail d’habitation en 2020, assorti d’un avantage temporaire sur le loyer, puis à une réévaluation invoquée par le bailleur en raison de travaux antérieurs à l’entrée des locataires. Ces derniers ont contesté le périmètre et le coût des travaux, alléguant un déplafonnement indu et une application inexacte des textes. Ils ont également dénoncé un risque plomb localisé, des défaillances de chauffage et des perturbations liées aux ascenseurs.

Par jugement du 15 mai 2023, le juge des contentieux de la protection a ordonné des travaux de retrait de plomb sous astreinte, alloué une indemnité de 374 euros pour le chauffage, et rejeté les autres demandes. Les locataires ont interjeté appel en recherchant une fixation judiciaire du loyer et l’extension des travaux à d’autres éléments. Le bailleur a sollicité la confirmation sur le loyer, l’irrecevabilité des prétentions nouvelles et la constatation de l’inutilité de l’astreinte, les travaux ayant été réalisés.

La question de droit essentielle portait sur l’interprétation de l’article 17 de la loi du 6 juillet 1989 et du décret du 27 juillet 2017, concernant la qualification de « travaux d’amélioration », leurs effets sur le plafonnement, le seuil de la moitié de l’année de loyer et l’exigence de performance énergétique. La cour affirme, notamment, que « La peinture des pièces de l’appartement ne peut non plus être considérée comme apportant un équipement nouveau ou une qualité supérieure », tandis que « A l’inverse, les opérations de plomberie et d’électricité sont de nature à fournir  » une plus grande sécurité  » ». Constatant un coût éligible de 9 080,84 euros TTC et une performance énergétique antérieure compatible, elle conclut que « la cour déduit des constatations qui précèdent que le bailleur pouvait augmenter le loyer ». Le retrait du plomb est déclaré sans objet après exécution, les charges sont régularisées, l’indemnité chauffage est confirmée, et la demande fondée sur l’immobilisation des ascenseurs est rejetée faute de preuve suffisante.

I. Définition opératoire des travaux d’amélioration et conditions de déplafonnement

A. Qualification matérielle des opérations admissibles

La décision distingue clairement les opérations d’entretien de celles apportant un surcroît qualitatif ou sécuritaire. Elle retient que « La peinture des pièces de l’appartement ne peut non plus être considérée comme apportant un équipement nouveau ou une qualité supérieure », ce qui écarte une assimilation abusive de simples remises en état à de véritables améliorations. L’exclusion de la « coordination des travaux », dépourvue par nature de substance constructive, confirme une lecture finalisée de la notion autour d’un apport tangible et durable.

À l’opposé, la cour identifie comme améliorations les interventions structurelles, orientées vers la sécurité ou la qualité de l’équipement. Elle souligne que « A l’inverse, les opérations de plomberie et d’électricité sont de nature à fournir  » une plus grande sécurité  » », et admet la rénovation complète d’une salle de bains, rénovée avec des éléments de gamme supérieure, comme apportant un « équipement nouveau ». L’approche met l’accent sur la cohérence d’ensemble de la pièce rénovée et l’incidence objective sur la valeur d’usage.

B. Seuil légal, preuve du coût et performance énergétique

Le contrôle de proportionnalité financière demeure central dans le régime dérogatoire au plafonnement. La cour constate que « Il est retenu que les  » travaux d’amélioration  » réalisés ont ainsi porté sur un montant au moins égal à la moitié de la dernière année de loyer », satisfaisant la condition du décret de 2017. Le juge d’appel s’attache aux factures détaillées et distingue les postes admissibles, ce qui garantit une vérification rigoureuse du « coût réel » exigé par les textes.

La performance énergétique préalable, classée D, répond au seuil de 331 kWh/m²/an, conditionnant l’augmentation permise lors d’une relocation. L’édifice argumentatif s’achève par une formule sans ambiguïté, qui scelle la solution sur le loyer: « La cour déduit des constatations qui précèdent que le bailleur pouvait augmenter le loyer ». Cette articulation, qui conjugue la qualification technique et le filtre quantitatif, s’inscrit dans la logique protectrice du dispositif tout en ménageant une juste rémunération de l’investissement.

II. Appréciation critique et portée pratique de la décision

A. Un raisonnement méthodique, protecteur contre les surqualifications

La ligne doctrinale, sobre, clarifie la frontière entre entretien et amélioration, en refusant l’inflation qualificationnelle de prestations cosmétiques. L’exclusion de la « coordination » et de la peinture de l’assiette des travaux d’amélioration évite une hausse artificielle de la base de calcul, au bénéfice d’un contrôle effectif du déplafonnement. Le ciblage sur la sécurité, la mise aux normes et la rénovation complète d’une pièce fonctionnelle traduit une exigence de consistance et de finalité.

Cette rigueur probatoire, appuyée sur des factures individualisées, renforce la prévisibilité pour les bailleurs comme pour les locataires. L’office de la cour, en neutralisant les éléments non admissibles, maintient l’équilibre recherché par le législateur entre encadrement et incitation à l’investissement utile. La motivation, qui distingue et hiérarchise les postes, sert de guide opérationnel aux praticiens confrontés à des chantiers hétérogènes.

B. Incidences sur les litiges connexes et gouvernance du bail

La solution rayonne au-delà du loyer en rappelant des exigences de preuve et d’utilité concrète. S’agissant du plomb, la juridiction retient le caractère devenu caduc de l’injonction après exécution, en énonçant: « Constate que la demande de travaux liés au retrait du plomb dégradé sur la persienne du salon de l’appartement est devenue sans objet ». La maîtrise du calendrier des travaux et la coopération des occupants conditionnent utilement l’issue procédurale.

Pour les charges, la décision entérine la régularisation et la possibilité de paiement par douzième, sans effacer la dette, ce qui préserve la finalité financière du mécanisme. L’indemnité liée au chauffage demeure mesurée, le juge rappelant que « Ce montant couvre la période de l’entrée dans les lieux […] à la réparation effective des systèmes de chauffage », sous l’angle de la contrepartie des services. Les prétentions relatives aux ascenseurs échouent, faute d’un lien de causalité suffisamment étayé malgré des propositions de relogement, tandis que les dépens et l’indemnité procédurale suivent la logique du succombement, « Confirme le jugement pour le surplus », dans une économie générale cohérente et prévisible.

Source : Cour de cassation – Base Open Data « Judilibre » & « Légifrance ».

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