Cour d’appel de Colmar, le 9 juillet 2025, n°24/03872
La Cour d’appel de Colmar, 9 juillet 2025, se prononce en matière de référé-provision dans un litige de vente industrielle portant sur des modules préfabriqués et des désordres d’étanchéité. L’acheteur-distributeur a suspendu le paiement de factures, tandis que le vendeur-fabricant sollicite une provision, après plusieurs interventions techniques demeurées discutées.
Le Tribunal judiciaire de Strasbourg, 16 octobre 2024, a rejeté le sursis, confirmé la compétence territoriale stipulée et accordé une provision partielle. Parallèlement, le juge des référés du tribunal de commerce de Lyon, 5 septembre 2024, a ordonné une expertise limitée à des chantiers précisément identifiés, dont les opérations restent en cours.
Devant la Cour, l’appelante invoque l’exception d’inexécution au regard d’un risque d’aggravation, et soutient une lecture extensive de la mission d’expertise. L’intimée sollicite la confirmation, arguant de l’absence de contestation sérieuse pour les factures relatives aux chantiers non visés par l’expertise.
La question centrale tient aux conditions d’une provision au sens de l’article 873 du code de procédure civile, en présence de désordres allégués et d’une expertise circonscrite. S’y ajoutent la portée d’une clause attributive de compétence entre commerçants et l’opportunité d’un sursis à statuer dans un contentieux fragmenté.
I – Le cadre procédural et l’office du juge des référés
A – Les prétentions recevables et la clause de compétence
La Cour rappelle d’emblée les exigences de l’article 954 du code de procédure civile: « A titre liminaire, la cour rappelle qu’en application de l’article 954 du code de procédure civile, elle ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif. » Cette précision borne l’office de la juridiction de recours, en écartant les simples demandes de « constater » ou « dire et juger » dépourvues d’effet juridique propre.
Sur la compétence, la Cour constate que la clause attributive, stipulée entre commerçants et « spécifiée de façon très apparente » au sens de l’article 48 du code de procédure civile, a été intégrée au champ contractuel selon les documents contractuels produits. Elle approuve le premier juge en énonçant: « Il y a donc lieu de confirmer l’ordonnance, qui a retenu l’application de la clause attributive de compétence territoriale. » La solution s’accorde avec le droit positif, la validité et l’opposabilité de telles clauses reposant sur la double condition d’une relation entre professionnels et d’une insertion apparente.
B – Le refus de sursis et la délimitation de l’expertise
La Cour circonscrit strictement la mission en cours. Elle précise: « Cependant, il va de soi que le périmètre de la mission de l’expert ne peut porter que sur “les garages litigieux”, ou “garages concernés”, c’est-à-dire ceux qui ont été expressément visés dans les conclusions soumises au débat. » La règle tient à la nature de la saisine du juge des référés et à la nécessaire sécurité procédurale qui s’attache à l’ordonnance de désignation.
À défaut d’extension régulièrement sollicitée et accordée, l’expertise ne saurait couvrir des chantiers non énumérés à l’origine. La conséquence s’impose logiquement: « Par conséquent, il ne saurait y avoir de sursis à statuer tel que demandé », le sursis ne pouvant être fondé sur une mesure qui ne concerne pas l’ensemble des factures litigieuses. Cette approche préserve la fonction du juge des référés, qui n’a ni à différer sans nécessité la décision, ni à instrumentaliser une expertise sur un périmètre non saisi.
II – Le référé-provision face aux désordres allégués
A – Le critère de l’obligation non sérieusement contestable
La Cour rappelle le texte de référence: « L’article 873 du code de procédure civile dispose que le président peut, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation, même s’il s’agit d’une obligation de faire. » Elle identifie alors les factures attachées à des chantiers compris dans la mission d’expertise, pour lesquels la contestation présente un sérieux suffisant et justifie l’exclusion de la provision.
S’agissant des autres factures, la Cour retient l’absence de contestation sérieuse. Elle exige une concordance rigoureuse entre les désordres allégués et les prestations facturées, démontrée par des éléments objectifs. Le paiement ne peut être retenu pour des livraisons non visées par l’expertise en cours, l’exception d’inexécution ne résultant pas du seul risque ultérieur ou d’éléments techniques non rattachés aux factures réclamées.
B – La portée probatoire et les enseignements pratiques
La Cour formule une exigence probatoire nette quant au sérieux de la contestation en référé. Elle juge que « La production de tels éléments de preuve – photographies et déclarations diverses -, non corroborés par une analyse technique, n’est en effet pas de nature à démontrer le caractère sérieux des contestations. » Les listes internes ou les constats unilatéraux ne suffisent pas sans vérification indépendante, telle qu’un constat d’huissier ou une expertise contradictoire ciblée.
La décision atteint un double objectif. Elle évite que l’expertise serve de prétexte à différer tout paiement, en rappelant que seules les factures liées aux « garages concernés » par la mission peuvent nourrir un doute sérieux. Elle incite aussi les opérateurs à documenter précisément, pour chaque facture, les désordres persistants après reprise et leur imputabilité. La charge d’alléguer et de prouver la contestation sérieuse se resserre ainsi, conformément à l’économie de l’article 873, tout en préservant les actions au fond et la garantie postérieure des non-conformités dûment établies.
La Cour d’appel de Colmar, 9 juillet 2025, se prononce en matière de référé-provision dans un litige de vente industrielle portant sur des modules préfabriqués et des désordres d’étanchéité. L’acheteur-distributeur a suspendu le paiement de factures, tandis que le vendeur-fabricant sollicite une provision, après plusieurs interventions techniques demeurées discutées.
Le Tribunal judiciaire de Strasbourg, 16 octobre 2024, a rejeté le sursis, confirmé la compétence territoriale stipulée et accordé une provision partielle. Parallèlement, le juge des référés du tribunal de commerce de Lyon, 5 septembre 2024, a ordonné une expertise limitée à des chantiers précisément identifiés, dont les opérations restent en cours.
Devant la Cour, l’appelante invoque l’exception d’inexécution au regard d’un risque d’aggravation, et soutient une lecture extensive de la mission d’expertise. L’intimée sollicite la confirmation, arguant de l’absence de contestation sérieuse pour les factures relatives aux chantiers non visés par l’expertise.
La question centrale tient aux conditions d’une provision au sens de l’article 873 du code de procédure civile, en présence de désordres allégués et d’une expertise circonscrite. S’y ajoutent la portée d’une clause attributive de compétence entre commerçants et l’opportunité d’un sursis à statuer dans un contentieux fragmenté.
I – Le cadre procédural et l’office du juge des référés
A – Les prétentions recevables et la clause de compétence
La Cour rappelle d’emblée les exigences de l’article 954 du code de procédure civile: « A titre liminaire, la cour rappelle qu’en application de l’article 954 du code de procédure civile, elle ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif. » Cette précision borne l’office de la juridiction de recours, en écartant les simples demandes de « constater » ou « dire et juger » dépourvues d’effet juridique propre.
Sur la compétence, la Cour constate que la clause attributive, stipulée entre commerçants et « spécifiée de façon très apparente » au sens de l’article 48 du code de procédure civile, a été intégrée au champ contractuel selon les documents contractuels produits. Elle approuve le premier juge en énonçant: « Il y a donc lieu de confirmer l’ordonnance, qui a retenu l’application de la clause attributive de compétence territoriale. » La solution s’accorde avec le droit positif, la validité et l’opposabilité de telles clauses reposant sur la double condition d’une relation entre professionnels et d’une insertion apparente.
B – Le refus de sursis et la délimitation de l’expertise
La Cour circonscrit strictement la mission en cours. Elle précise: « Cependant, il va de soi que le périmètre de la mission de l’expert ne peut porter que sur “les garages litigieux”, ou “garages concernés”, c’est-à-dire ceux qui ont été expressément visés dans les conclusions soumises au débat. » La règle tient à la nature de la saisine du juge des référés et à la nécessaire sécurité procédurale qui s’attache à l’ordonnance de désignation.
À défaut d’extension régulièrement sollicitée et accordée, l’expertise ne saurait couvrir des chantiers non énumérés à l’origine. La conséquence s’impose logiquement: « Par conséquent, il ne saurait y avoir de sursis à statuer tel que demandé », le sursis ne pouvant être fondé sur une mesure qui ne concerne pas l’ensemble des factures litigieuses. Cette approche préserve la fonction du juge des référés, qui n’a ni à différer sans nécessité la décision, ni à instrumentaliser une expertise sur un périmètre non saisi.
II – Le référé-provision face aux désordres allégués
A – Le critère de l’obligation non sérieusement contestable
La Cour rappelle le texte de référence: « L’article 873 du code de procédure civile dispose que le président peut, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation, même s’il s’agit d’une obligation de faire. » Elle identifie alors les factures attachées à des chantiers compris dans la mission d’expertise, pour lesquels la contestation présente un sérieux suffisant et justifie l’exclusion de la provision.
S’agissant des autres factures, la Cour retient l’absence de contestation sérieuse. Elle exige une concordance rigoureuse entre les désordres allégués et les prestations facturées, démontrée par des éléments objectifs. Le paiement ne peut être retenu pour des livraisons non visées par l’expertise en cours, l’exception d’inexécution ne résultant pas du seul risque ultérieur ou d’éléments techniques non rattachés aux factures réclamées.
B – La portée probatoire et les enseignements pratiques
La Cour formule une exigence probatoire nette quant au sérieux de la contestation en référé. Elle juge que « La production de tels éléments de preuve – photographies et déclarations diverses -, non corroborés par une analyse technique, n’est en effet pas de nature à démontrer le caractère sérieux des contestations. » Les listes internes ou les constats unilatéraux ne suffisent pas sans vérification indépendante, telle qu’un constat d’huissier ou une expertise contradictoire ciblée.
La décision atteint un double objectif. Elle évite que l’expertise serve de prétexte à différer tout paiement, en rappelant que seules les factures liées aux « garages concernés » par la mission peuvent nourrir un doute sérieux. Elle incite aussi les opérateurs à documenter précisément, pour chaque facture, les désordres persistants après reprise et leur imputabilité. La charge d’alléguer et de prouver la contestation sérieuse se resserre ainsi, conformément à l’économie de l’article 873, tout en préservant les actions au fond et la garantie postérieure des non-conformités dûment établies.