La Cour administrative d’appel de Nancy, par une décision du 10 juillet 2025, statue sur la légalité d’un refus opposé à une demande d’autorisation environnementale. Une société pétitionnaire souhaitait implanter trois aérogénérateurs, mais le représentant de l’État a rejeté cette sollicitation pour des motifs de biodiversité et de rentabilité. Le juge administratif doit ici déterminer si l’administration peut légalement fonder son rejet sur l’équilibre économique d’une opération ou sur des impacts environnementaux régularisés. Après avoir contesté l’arrêté initial, la requérante a proposé de réduire son projet à deux éoliennes afin de limiter les nuisances paysagères et écologiques identifiées. La juridiction d’appel annule la décision préfectorale en soulignant l’incompétence de l’autorité administrative pour apprécier la rentabilité propre d’un investissement privé dans ce cadre. Elle exerce ensuite son pouvoir de pleine juridiction pour délivrer elle-même l’autorisation nécessaire, tout en renvoyant la fixation des prescriptions techniques au préfet.
I. L’encadrement strict des motifs de refus par le juge administratif
L’arrêt précise que l’administration ne peut pas s’immiscer dans la gestion financière du pétitionnaire au-delà du contrôle des capacités minimales requises par la loi. La Cour rappelle qu’il « n’appartient pas à l’administration d’apprécier l’équilibre financier d’un projet en dehors de l’appréciation des capacités financières de la société ». Cette solution protège la liberté d’entreprendre contre une appréciation opportuniste de la viabilité commerciale de l’installation par l’autorité de police environnementale. Dès lors que les garanties de remise en état sont assurées, le risque économique demeure à la charge exclusive de l’exploitant, sans justifier un refus.
Par ailleurs, la réduction du périmètre du projet initial permet de neutraliser efficacement les griefs relatifs à la protection du patrimoine et de la biodiversité. En supprimant l’aérogénérateur le plus proche des monuments historiques, la société a fait disparaître les motifs tirés de l’atteinte visuelle au château et à la maison forte. Le juge constate que les impacts sur l’habitat de la pie-grièche écorcheur s’effacent également puisque le bosquet concerné ne sera plus détruit par les travaux prévus. Cette démarche d’évitement, confirmée durant l’instance, rend les motifs initiaux de l’arrêté préfectoral infondés au regard de la nouvelle configuration du parc éolien.
II. Le plein contentieux environnemental au service de la sécurité juridique
La juridiction procède à une analyse concrète de la suffisance de l’étude d’impact en tenant compte des mesures de réduction des risques pour l’avifaune. Elle écarte le grief d’irrégularité du dossier en relevant que « le survol du site demeure une éventualité sérieuse » sans toutefois caractériser une lacune rédhibitoire d’information. La mise en place d’une « mesure de réduction par bridage en période de fauche » apparaît suffisante pour protéger le Milan royal selon l’autorité environnementale compétente. Le juge privilégie ainsi une approche proportionnée où l’efficacité technique des dispositifs proposés l’emporte sur l’opposition de principe manifestée par les services d’inspection.
L’arrêt illustre enfin la plénitude de juridiction du magistrat administratif qui peut substituer sa propre décision à celle de l’autorité préfectorale après l’annulation. Le juge dispose du pouvoir « d’accorder lui-même cette autorisation aux conditions qu’il fixe » ou de renvoyer le bénéficiaire devant le préfet pour cette détermination. La Cour de Nancy choisit ici de délivrer directement l’autorisation pour les deux éoliennes restantes tout en enjoignant à l’administration de définir les prescriptions techniques indispensables. Cette procédure accélère la réalisation des projets conformes aux exigences environnementales en évitant une simple annulation qui obligerait le pétitionnaire à recommencer ses démarches.