Cour d’appel administrative de Marseille, le 30 janvier 2025, n°23MA00443

Par un arrêt rendu le 30 janvier 2025, la Cour administrative d’appel de Marseille précise les conditions de recevabilité des recours contre les permis de construire. En l’espèce, une autorité municipale a délivré une autorisation pour la démolition d’une habitation et la création d’une villa d’une surface importante. Des propriétaires voisins ont sollicité l’annulation de cet arrêté devant le tribunal administratif de Toulon, lequel a rejeté leur demande le 23 décembre 2022. Les requérants soutenaient que le projet affectait leurs conditions de jouissance par une perte de vue sur la mer ainsi que des vis-à-vis. La Cour administrative d’appel de Marseille admet d’abord la recevabilité du recours avant de constater une illégalité relative à la hauteur de la construction.

I. La reconnaissance de la recevabilité du recours et de la régularité formelle du dossier

A. Une appréciation concrète de l’intérêt à agir fondée sur la perte de vue

La juridiction administrative rappelle que le voisin immédiat bénéficie d’une présomption d’intérêt à agir dès lors qu’il invoque des éléments précis sur le projet. En l’occurrence, les requérants invoquaient une perte de vue sur la mer ainsi que la création de nouvelles vues depuis la partie supérieure de l’ouvrage. La Cour juge que ces éléments « ne constituent pas des atteintes dépourvues de réalité » au sens des dispositions de l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme. Cette solution protège efficacement les conditions de jouissance des riverains immédiats contre les projets modifiant significativement leur cadre de vie quotidien.

B. La validation du contenu du dossier de demande malgré sa représentation graphique

La contestation portait également sur l’incomplétude du dossier, notamment en raison de la représentation graphique des façades vitrées derrière des volets coulissants fermés. Néanmoins, les juges considèrent que la notice architecturale permettait au service instructeur d’apprécier « de manière éclairée, l’insertion du projet litigieux dans son environnement ». La seule circonstance que les volets soient illustrés fermés ne suffit pas à caractériser une insincérité du pétitionnaire lors du dépôt de sa demande. Cette régularité formelle du dossier de demande conduit alors les magistrats à examiner les moyens de légalité interne soulevés par les requérants.

II. La sanction de la méconnaissance des règles de hauteur et le recours à la régularisation

A. Une application stricte des modalités de calcul du gabarit enveloppe de la construction

Le litige porte principalement sur le respect des limites de hauteur fixées par le plan local d’urbanisme à sept mètres pour les constructions. Le règlement municipal prévoit que la mesure s’effectue depuis le niveau du sol naturel ou excavé « à l’aplomb du nu extérieur des façades ». Or, les calculs révèlent en l’espèce une hauteur totale du gabarit enveloppe de l’ouvrage atteignant neuf mètres trente-cinq au-dessus du sol naturel. Cette méconnaissance des règles de hauteur constitue une illégalité interne qui entache la validité de l’arrêté accordé par le maire de la commune.

B. La mise en œuvre obligatoire du sursis à statuer en vue d’une mise en conformité

L’existence d’une telle méconnaissance de la règle d’urbanisme impose à la juridiction administrative d’envisager les modalités de sanction ou de réparation de l’acte. Toutefois, le juge fait application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme en estimant que le vice est susceptible d’être régularisé. Cette régularisation n’implique pas un bouleversement tel qu’il en changerait la nature même du projet architectural initialement déposé par le pétitionnaire. Il est donc sursis à statuer pour une durée de six mois afin de permettre la production d’une mesure de mise en conformité.

Source : Cour de cassation – Base Open Data « Judilibre » & « Légifrance ».

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