Tribunal judiciaire de Tours, le 19 juin 2025, n°23/04544

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Rendu par le Tribunal judiciaire de Tours le 19 juin 2025 (n° RG 23/04544), le jugement tranche un litige né d’un bon de commande conclu lors d’une manifestation commerciale. Des consommateurs ont signé une commande de cuisine équipée le 10 mai 2023, remis un chèque d’acompte, puis opposé le paiement. Le professionnel a réclamé l’application d’une clause pénale de 40 % du prix, une indemnité de stockage, et la réparation d’un préjudice économique.

La procédure a opposé les acheteurs au professionnel, tandis qu’un intervenant volontaire, distinct de la société cocontractante, a également agi. Les défendeurs ont invoqué des manquements aux obligations d’information du Code de la consommation et la nullité du contrat. Le tribunal a d’abord écarté l’action de l’intervenant pour absence d’intérêt à agir, puis a rejeté la nullité, tout en modulant la clause pénale et en allouant une indemnité pour préjudice économique. Le jugement relève que « La nullité du contrat n’est pas encourue, et le contrat signé le 10 mai 2023 a vocation à s’appliquer. » Il retient encore que « Au regard de ces éléments, le montant de la clause pénale sera en conséquence réduit à la somme de 1 000 euros. » L’enjeu juridique central porte sur l’articulation des obligations d’information précontractuelles avec le régime spécifique des ventes en foire, et sur le pouvoir modérateur du juge en matière de clause pénale.

I. Le cadre contractuel validé à l’aune des règles d’information et des ventes en foire

A. La recevabilité resserrée autour de l’intérêt à agir

Le tribunal rappelle les articles 31 et 32 du Code de procédure civile et exige un intérêt à agir en lien avec le contrat en cause. L’intervenant, distinct de la société signataire et non représentant social, ne justifiait d’aucun lien pertinent. Le jugement statue nettement que « Ses demandes doivent en conséquence être déclarées irrecevables », ce qui neutralise corrélativement les prétentions dirigées contre lui.

La solution est cohérente avec une conception stricte de l’intérêt, évitant l’élargissement artificiel du cercle des plaideurs. Elle clarifie le périmètre subjectif du litige contractuel, en concentrant le débat sur les seuls cocontractants, conformément à la sécurité des échanges. Cette rigueur procédurale conditionne la discussion de fond, dont l’économie repose sur la qualité de consommateur et de professionnel.

B. L’absence de nullité au regard des informations et du régime des foires

Le tribunal confronte les griefs fondés sur les articles L.111-1 et s. du Code de la consommation, et rappelle la charge probatoire pesant sur le professionnel. Il retient néanmoins que les documents contractuels précisaient les éléments essentiels de la vente, sa livraison et l’identification du vendeur. La motivation souligne que « La nullité du contrat n’est pas encourue, et le contrat signé le 10 mai 2023 a vocation à s’appliquer. » Cette appréciation se place dans le sillage de la solution selon laquelle seule l’atteinte aux éléments essentiels peut vicier le consentement, ainsi que l’énonce la référence à la première chambre civile du 20 décembre 2023.

Le régime spécifique des ventes en foire, enfin, est expressément mobilisé. Le juge constate que la mention d’absence de rétractation était lisible et encadrée, conformément aux textes. L’énoncé est précis: « Il ne peut cependant qu’être constaté à la lecture du bon de commande que la mention “A l’occasion d’une foire, d’un salon ou de toute manifestation commerciale, le consommateur ne dispose pas d’un délai de rétractation” figure à deux reprises ». Le rappel d’un ancien numéro d’article ne vicie pas l’information dès lors que le message matériellement requis est présent et apparent. Cette analyse privilégie la finalité informative et la loyauté formelle du support, plutôt que la stricte référence codifiée, sans excéder le cadre légal.

La validation de l’assise contractuelle conduit alors au terrain des sanctions de l’inexécution et de l’évaluation du préjudice, où s’exerce le pouvoir de modulation.

II. Le traitement des sanctions: pouvoir modérateur et réparation accessoire

A. La modulation de la clause pénale à l’aune du préjudice réel

S’agissant de la clause stipulant 40 % du prix en cas de défaillance, le tribunal la qualifie de clause pénale et met en œuvre l’article 1231-5 du Code civil. Les critères retenus sont classiques et pertinents: laps de temps très court entre la commande et l’opposition, absence d’achats de matériaux établis, absence de travaux engagés. La motivation, à cet égard, est nette: « Au regard de ces éléments, le montant de la clause pénale sera en conséquence réduit à la somme de 1 000 euros. »

Ce contrôle de proportionnalité s’aligne sur la fonction comminatoire de la clause pénale et sur la nécessité d’éviter un enrichissement sans cause. La décision illustre une application concrète et mesurée du pouvoir modérateur, qui n’anéantit pas la clause mais la réévalue en fonction du dommage objectivement justifié. Elle rappelle utilement que l’exigibilité d’une pénalité suppose la mise en demeure, formalisée ici, tout en refusant de faire de la stipulation un instrument de pression déconnecté de l’atteinte subie.

B. Les chefs accessoires: rejet des frais de stockage et reconnaissance d’un préjudice économique

Le tribunal écarte la demande d’indemnité d’immobilisation et de stockage, faute de preuve de commandes de meubles ou d’électroménager et d’un préjudice corrélatif. L’exigence probatoire est ferme, et assortie d’une logique de stricte causalité. À l’inverse, l’opposition au chèque a généré un dommage certain de trésorerie. La formation juge que « Elle a cependant subi un préjudice économique certain […] dont elle sera indemnisée à hauteur de 1 000 euros. » La cohérence d’ensemble est préservée: les manques de preuve conduisent au rejet, mais l’atteinte avérée à la liquidité est réparée.

Le jugement refuse encore de connaître d’une sanction administrative, réaffirmant la compétence exclusive des autorités habilitées. Il confirme l’économie des dépens et de l’article 700 dans la configuration des prétentions respectives, en rappelant enfin une règle procédurale ferme: « Il sera rappelé que l’exécution provisoire est de droit par application de l’article 514 du code de procédure civile. » L’ensemble dessine une solution équilibrée, respectueuse du droit de la consommation, des principes du droit des obligations et des exigences probatoires.

Source : Cour de cassation – Base Open Data « Judilibre » & « Légifrance ».

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