Tribunal judiciaire de Lille, le 23 juin 2025, n°25/00816
Le syndicat des copropriétaires qui poursuit le recouvrement de charges impayées doit justifier du bien-fondé de chaque somme réclamée, y compris les frais annexes portés au décompte. Le tribunal judiciaire de Lille, dans un jugement du 23 juin 2025, rappelle cette exigence en opérant un contrôle minutieux des débits contestables.
En l’espèce, un syndicat des copropriétaires d’une résidence située dans le Nord a assigné deux copropriétaires en paiement d’une somme de 10 456,76 euros correspondant aux charges de copropriété impayées pour plusieurs lots. Les défendeurs, régulièrement assignés selon les modalités de l’article 659 du code de procédure civile, n’ont pas comparu. Le syndicat demandeur invoquait les articles 10 et suivants de la loi du 10 juillet 1965 pour fonder sa créance et sollicitait en outre la condamnation solidaire des défendeurs aux dépens ainsi qu’au paiement d’une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Le tribunal devait déterminer si la créance réclamée était justifiée dans son intégralité, notamment au regard des nombreux frais de recouvrement inclus dans le décompte présenté par le syndic.
Le tribunal judiciaire de Lille accueille partiellement la demande. Il condamne solidairement les défendeurs au paiement de la somme de 8 554,43 euros, soit près de 1 900 euros de moins que la somme initialement réclamée, après avoir écarté plusieurs postes de frais insuffisamment justifiés.
Cette décision illustre le contrôle juridictionnel exercé sur les frais de recouvrement facturés par le syndic (I), tout en confirmant l’obligation fondamentale des copropriétaires de contribuer aux charges communes (II).
I. Le contrôle rigoureux des frais de recouvrement imputés au copropriétaire débiteur
Le tribunal procède à un examen détaillé de chaque poste de frais réclamé (A), appliquant strictement les stipulations du contrat de syndic pour écarter ceux qui ne répondent pas aux conditions prévues (B).
A. L’examen individualisé des postes de frais contestables
Le tribunal analyse méthodiquement chaque ligne du décompte présenté par le syndicat. Il relève que plusieurs sommes ont été portées au débit du compte des copropriétaires défaillants sous des intitulés variés : « suivi procédure de recouvrement », « suivi du dossier transmis à l’avocat » ou encore « constitution dossier huissier ». Pour chacun de ces postes, le juge recherche si les pièces versées aux débats permettent d’en justifier le bien-fondé.
Cette démarche s’inscrit dans le cadre de l’article 472 du code de procédure civile qui impose au juge, même en l’absence de comparution du défendeur, de ne faire droit à la demande que « dans la mesure où il l’estime régulière, recevable, et bien fondée ». Le défaut de comparution n’emporte donc pas reconnaissance de la dette et n’exonère pas le demandeur de la charge de la preuve.
Le tribunal constate ainsi qu’aucune des pièces produites ne justifie certains débits, notamment une somme de 126,33 euros dont l’origine demeure inexpliquée. De même, les honoraires facturés au titre du « suivi procédure de recouvrement » sont écartés faute de démonstration de l’existence réelle d’un tel suivi et de la prévision d’une telle prestation au contrat de syndic.
B. L’application stricte des stipulations contractuelles relatives aux diligences exceptionnelles
Le tribunal se réfère expressément à l’article 9.1 du contrat de syndic pour apprécier la validité des frais réclamés. Cette stipulation prévoit que certains honoraires ne sont dus qu’« uniquement en cas de diligences exceptionnelles ». Le juge constate qu’il n’est « justifié d’aucune diligence exceptionnelle » pour plusieurs postes facturés, notamment la constitution de dossier avocat et la constitution de dossier huissier, chacun d’un montant de 350 euros.
Cette position rejoint la jurisprudence constante qui encadre strictement les frais susceptibles d’être imputés au copropriétaire défaillant sur le fondement de l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965. Ce texte vise les « frais nécessaires exposés par le syndicat » pour le recouvrement de sa créance. La nécessité suppose que les frais correspondent à des prestations réellement accomplies et contractuellement prévues.
Le tribunal ne retient finalement que le coût du commandement de payer, soit 173,38 euros, estimant que « cette diligence était en outre utile en l’état d’une dette devenant significative et en l’absence totale de paiement des charges ». Le critère d’utilité vient ainsi compléter celui de la justification pour apprécier le caractère recouvrable des frais.
II. La confirmation de l’obligation de contribution aux charges de copropriété
Le tribunal réaffirme le principe de l’obligation de paiement des charges pesant sur tout copropriétaire (A) et en tire les conséquences quant aux condamnations accessoires (B).
A. Le fondement légal de la créance de charges
Le tribunal vise les articles 10, 10-1 et 14-1 de la loi du 10 juillet 1965 pour fonder la condamnation des défendeurs. Il rappelle que « les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d’équipement commun » ainsi qu’aux « charges relatives à la conservation, à l’entretien et à l’administration des parties communes ». Cette obligation légale est d’ordre public et ne souffre aucune exception tenant à la situation personnelle du débiteur.
Le syndicat avait produit l’ensemble des pièces nécessaires à l’établissement de sa créance : règlement de copropriété, contrat de syndic, appels de fonds et décompte actualisé. Le tribunal constate que « les pièces versées au débat suffisent à établir la créance du syndicat » pour ce qui concerne les charges proprement dites, déduction faite des frais injustifiés.
La condamnation porte sur la somme de 8 554,43 euros arrêtée au premier janvier 2025, incluant les appels de provision sur charges et la cotisation au fonds de travaux du premier trimestre 2025. Le point de départ des intérêts est fixé au 8 octobre 2024, date du commandement de payer, le tribunal écartant la mise en demeure du 30 août 2024 faute de production de l’accusé de réception.
B. Les condamnations accessoires et le rejet du surplus
Le tribunal condamne solidairement les défendeurs aux dépens et au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, conformément à la demande du syndicat. L’équité justifie cette condamnation compte tenu de la défaillance persistante des copropriétaires dans le règlement de leurs charges.
Le dispositif rejette cependant « le surplus des demandes », formule qui vise l’écart entre la somme initialement réclamée de 10 456,76 euros et celle finalement allouée. Ce rejet partiel sanctionne l’inclusion dans le décompte de frais non justifiés ou ne répondant pas aux conditions contractuelles d’exigibilité.
Cette décision présente une portée pédagogique certaine pour les syndics de copropriété. Elle rappelle que le mécanisme de l’article 10-1 de la loi de 1965, qui permet d’imputer au seul copropriétaire défaillant les frais de recouvrement, n’autorise pas une facturation discrétionnaire. Chaque poste doit être justifié par une prestation réelle, prévue au contrat et, le cas échéant, répondant aux conditions particulières stipulées pour son exigibilité. Le juge conserve un pouvoir de contrôle effectif que l’absence de comparution du défendeur ne saurait neutraliser.
Le syndicat des copropriétaires qui poursuit le recouvrement de charges impayées doit justifier du bien-fondé de chaque somme réclamée, y compris les frais annexes portés au décompte. Le tribunal judiciaire de Lille, dans un jugement du 23 juin 2025, rappelle cette exigence en opérant un contrôle minutieux des débits contestables.
En l’espèce, un syndicat des copropriétaires d’une résidence située dans le Nord a assigné deux copropriétaires en paiement d’une somme de 10 456,76 euros correspondant aux charges de copropriété impayées pour plusieurs lots. Les défendeurs, régulièrement assignés selon les modalités de l’article 659 du code de procédure civile, n’ont pas comparu. Le syndicat demandeur invoquait les articles 10 et suivants de la loi du 10 juillet 1965 pour fonder sa créance et sollicitait en outre la condamnation solidaire des défendeurs aux dépens ainsi qu’au paiement d’une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Le tribunal devait déterminer si la créance réclamée était justifiée dans son intégralité, notamment au regard des nombreux frais de recouvrement inclus dans le décompte présenté par le syndic.
Le tribunal judiciaire de Lille accueille partiellement la demande. Il condamne solidairement les défendeurs au paiement de la somme de 8 554,43 euros, soit près de 1 900 euros de moins que la somme initialement réclamée, après avoir écarté plusieurs postes de frais insuffisamment justifiés.
Cette décision illustre le contrôle juridictionnel exercé sur les frais de recouvrement facturés par le syndic (I), tout en confirmant l’obligation fondamentale des copropriétaires de contribuer aux charges communes (II).
I. Le contrôle rigoureux des frais de recouvrement imputés au copropriétaire débiteur
Le tribunal procède à un examen détaillé de chaque poste de frais réclamé (A), appliquant strictement les stipulations du contrat de syndic pour écarter ceux qui ne répondent pas aux conditions prévues (B).
A. L’examen individualisé des postes de frais contestables
Le tribunal analyse méthodiquement chaque ligne du décompte présenté par le syndicat. Il relève que plusieurs sommes ont été portées au débit du compte des copropriétaires défaillants sous des intitulés variés : « suivi procédure de recouvrement », « suivi du dossier transmis à l’avocat » ou encore « constitution dossier huissier ». Pour chacun de ces postes, le juge recherche si les pièces versées aux débats permettent d’en justifier le bien-fondé.
Cette démarche s’inscrit dans le cadre de l’article 472 du code de procédure civile qui impose au juge, même en l’absence de comparution du défendeur, de ne faire droit à la demande que « dans la mesure où il l’estime régulière, recevable, et bien fondée ». Le défaut de comparution n’emporte donc pas reconnaissance de la dette et n’exonère pas le demandeur de la charge de la preuve.
Le tribunal constate ainsi qu’aucune des pièces produites ne justifie certains débits, notamment une somme de 126,33 euros dont l’origine demeure inexpliquée. De même, les honoraires facturés au titre du « suivi procédure de recouvrement » sont écartés faute de démonstration de l’existence réelle d’un tel suivi et de la prévision d’une telle prestation au contrat de syndic.
B. L’application stricte des stipulations contractuelles relatives aux diligences exceptionnelles
Le tribunal se réfère expressément à l’article 9.1 du contrat de syndic pour apprécier la validité des frais réclamés. Cette stipulation prévoit que certains honoraires ne sont dus qu’« uniquement en cas de diligences exceptionnelles ». Le juge constate qu’il n’est « justifié d’aucune diligence exceptionnelle » pour plusieurs postes facturés, notamment la constitution de dossier avocat et la constitution de dossier huissier, chacun d’un montant de 350 euros.
Cette position rejoint la jurisprudence constante qui encadre strictement les frais susceptibles d’être imputés au copropriétaire défaillant sur le fondement de l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965. Ce texte vise les « frais nécessaires exposés par le syndicat » pour le recouvrement de sa créance. La nécessité suppose que les frais correspondent à des prestations réellement accomplies et contractuellement prévues.
Le tribunal ne retient finalement que le coût du commandement de payer, soit 173,38 euros, estimant que « cette diligence était en outre utile en l’état d’une dette devenant significative et en l’absence totale de paiement des charges ». Le critère d’utilité vient ainsi compléter celui de la justification pour apprécier le caractère recouvrable des frais.
II. La confirmation de l’obligation de contribution aux charges de copropriété
Le tribunal réaffirme le principe de l’obligation de paiement des charges pesant sur tout copropriétaire (A) et en tire les conséquences quant aux condamnations accessoires (B).
A. Le fondement légal de la créance de charges
Le tribunal vise les articles 10, 10-1 et 14-1 de la loi du 10 juillet 1965 pour fonder la condamnation des défendeurs. Il rappelle que « les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d’équipement commun » ainsi qu’aux « charges relatives à la conservation, à l’entretien et à l’administration des parties communes ». Cette obligation légale est d’ordre public et ne souffre aucune exception tenant à la situation personnelle du débiteur.
Le syndicat avait produit l’ensemble des pièces nécessaires à l’établissement de sa créance : règlement de copropriété, contrat de syndic, appels de fonds et décompte actualisé. Le tribunal constate que « les pièces versées au débat suffisent à établir la créance du syndicat » pour ce qui concerne les charges proprement dites, déduction faite des frais injustifiés.
La condamnation porte sur la somme de 8 554,43 euros arrêtée au premier janvier 2025, incluant les appels de provision sur charges et la cotisation au fonds de travaux du premier trimestre 2025. Le point de départ des intérêts est fixé au 8 octobre 2024, date du commandement de payer, le tribunal écartant la mise en demeure du 30 août 2024 faute de production de l’accusé de réception.
B. Les condamnations accessoires et le rejet du surplus
Le tribunal condamne solidairement les défendeurs aux dépens et au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, conformément à la demande du syndicat. L’équité justifie cette condamnation compte tenu de la défaillance persistante des copropriétaires dans le règlement de leurs charges.
Le dispositif rejette cependant « le surplus des demandes », formule qui vise l’écart entre la somme initialement réclamée de 10 456,76 euros et celle finalement allouée. Ce rejet partiel sanctionne l’inclusion dans le décompte de frais non justifiés ou ne répondant pas aux conditions contractuelles d’exigibilité.
Cette décision présente une portée pédagogique certaine pour les syndics de copropriété. Elle rappelle que le mécanisme de l’article 10-1 de la loi de 1965, qui permet d’imputer au seul copropriétaire défaillant les frais de recouvrement, n’autorise pas une facturation discrétionnaire. Chaque poste doit être justifié par une prestation réelle, prévue au contrat et, le cas échéant, répondant aux conditions particulières stipulées pour son exigibilité. Le juge conserve un pouvoir de contrôle effectif que l’absence de comparution du défendeur ne saurait neutraliser.