Tribunal judiciaire de Grenoble, le 19 juin 2025, n°25/00560

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Le tribunal judiciaire de Grenoble, le 19 juin 2025, statuant selon la procédure accélérée au fond, a tranché un contentieux de charges de copropriété. Un copropriétaire, débiteur d’un arriéré et de provisions, a reçu un commandement avec mise en demeure le 29 janvier 2025, après un précédent jugement du 21 décembre 2023 lui ayant accordé des délais. Le syndicat a assigné le 28 mars 2025 en paiement d’un arriéré arrêté au 12 mars 2025, des provisions exigibles, de dommages-intérêts pour résistance abusive, ainsi que d’une somme sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Le défendeur, régulièrement assigné, n’a pas comparu. L’affaire, réputée contradictoire, mettait aux prises deux thèses: l’une, soutenant l’exigibilité des sommes approuvées et des provisions déchues, l’autre, contestant implicitement la réunion des conditions de l’article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965.

La question posée tenait à l’étendue de l’obligation de contribution aux charges après approbation des comptes, et aux conditions d’exigibilité anticipée des provisions au titre de l’article 19-2. Elle portait aussi sur les accessoires de la créance: point de départ des intérêts, capitalisation, allocation de frais irrépétibles et possibilité d’une condamnation distincte à dommages-intérêts. Le tribunal juge que les comptes approuvés et les budgets votés suffisent à fonder l’obligation de payer l’arriéré, et que la mise en demeure assortie du délai légal opère déchéance du terme pour les provisions. Il condamne le copropriétaire à 2 628,50 €, intérêts au taux légal à compter du 29 janvier 2025, ordonne la capitalisation annuelle à compter du 28 mars 2025, alloue 400 € au titre de l’article 700, déboute de la demande de dommages-intérêts, et rappelle l’exécution provisoire de droit.

I. L’exigibilité des charges et des provisions en copropriété

A. Le fondement légal et la force des décisions d’assemblée

Le tribunal rappelle d’abord l’assiette de la contribution aux charges. Sont reproduites les premières lignes de l’article 10, telles qu’interprétées par la juridiction: « les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d’équipement commun ». L’office du juge consiste à vérifier l’existence des décisions collectives régulières, sans rouvrir le débat clos par l’absence de contestation dans les délais.

La décision consacre expressément la force contraignante des comptes approuvés. Elle énonce: « L’obligation à la dette existe, dès lors que l’assemblée générale des copropriétaires a approuvé les comptes présentés par le syndic et qu’aucun recours n’a été formé dans le délai légal, mentionné à l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965. » Ce considérant, classique, confirme que l’approbation ferme l’exception relative au quantum des dépenses communes, sauf action en annulation introduite à temps. La chronologie produite (approbation des exercices clos au 30 septembre 2022 puis 2023, budgets 2023/2024 et 2024/2025) suffit donc à asseoir le principe de la condamnation au titre de l’arriéré.

Sur le décompte, le tribunal opère une correction sobre et cohérente. Il exclut du principal 88,76 € au titre des frais d’assignation, devant relever des dépens, et réaffecte une part des provisions initialement réclamées, devenues entre-temps échues, sur l’arriéré. La motivation précise que cette opération « modif[ie] seulement la ventilation et non le montant total des sommes réclamées ». La solution garantit l’exactitude de la base légale sans avantager artificiellement l’une des rubriques.

B. La mise en demeure, la déchéance du terme et le contrôle du juge

La juridiction définit ensuite son office à l’égard de l’article 19-2. Elle déclare: « Il appartient au juge chargé d’appliquer l’article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965 de constater le vote du budget prévisionnel par l’assemblée générale de la copropriété ainsi que la déchéance du terme, avant de condamner le copropriétaire défaillant au versement des provisions prévues à l’article 14-1 et devenues exigibles. » Cette formule, nette, articule conditions et logique de condamnation: budget voté, commandement avec mise en demeure, écoulement du délai de trente jours.

Les pièces établissent la réunion de ces conditions: budgets prévisionnels adoptés, commandement du 29 janvier 2025 mentionnant la déchéance à l’issue du délai, et défaut de paiement complet dans les trente jours. Le tribunal fixe en conséquence une condamnation ventilée entre arriéré arrêté au 28 avril 2025 (1 853,66 €) et provisions devenues exigibles (774,84 €), totalisant 2 628,50 €. Les intérêts courent au taux légal à compter de la mise en demeure du 29 janvier 2025, ce qui respecte la règle du point de départ en matière de dettes de somme après sommation. Cette première partie, centrée sur le sens de la solution, appelle d’examiner ses accessoires et sa portée pratique.

II. Les accessoires de la créance et la portée de la décision

A. Intérêts, capitalisation et frais irrépétibles

La décision précise deux accessoires financiers. D’abord, elle ordonne la capitalisation annuelle des intérêts postérieurement à l’assignation. Le dispositif énonce: « Ordonne la capitalisation des intérêts par année entière à compter du 28 mars 2025; ». Le rappel de l’article 1343-2 du code civil est implicite, mais la date retenue, postérieure à l’introduction de l’instance, prévient toute capitalisation prématurée. Le schéma est pédagogique: point de départ des intérêts au commandement, puis anatocisme à compter de l’année révolue suivant l’assignation.

Ensuite, l’allocation de 400 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile illustre une appréciation mesurée des frais exposés et non compris dans les dépens. Le tribunal veille simultanément à la bonne affectation des frais d’assignation aux dépens, écartant leur imputation au principal. Cette combinaison renforce la lisibilité des sommes dues et évite de brouiller la distinction des postes. Elle s’inscrit dans une jurisprudence constante, attentive à la qualification exacte des frais de recouvrement.

B. Le rejet des dommages-intérêts et l’équilibre des intérêts en copropriété

S’agissant des dommages-intérêts sollicités pour résistance abusive, la juridiction se réfère au régime des intérêts moratoires. Elle motive par l’insuffisance de preuve d’un préjudice distinct du retard, et par l’absence de mauvaise foi établie. Le visa est explicite: l’« application de l’article 1231-6 alinéa 3 du code civil ». La solution refuse la double sanction, rappelant que l’intérêt de retard répare en principe l’entier préjudice du retard, sauf circonstance particulière démontrée. Cette exigence probatoire protège contre les demandes accessoires de principe.

La portée pratique est nette. D’un côté, la décision confirme un cadre opératoire rigoureux pour les syndicats: approbation des comptes, vote des budgets, commandement régulier, et preuve de la déchéance du terme. De l’autre, elle rappelle les limites des prétentions accessoires sans fondement autonome, tout en assurant l’effectivité de l’exécution. Le dispositif « Rappelle que l’exécution provisoire est de droit. » Ce rappel, conforme au droit positif, renforce l’autorité du titre et la trésorerie de la copropriété, sans préjuger de l’appel. L’ensemble contribue à une jurisprudence de stabilité: prévisibilité de l’exigibilité, exactitude des ventilations, prudence sur les pénalités, et vigilance sur l’affectation des frais.

Source : Cour de cassation – Base Open Data « Judilibre » & « Légifrance ».

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