Cour d’appel de Metz, le 17 juillet 2025, n°24/00164

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Par un arrêt du 17 juillet 2025, la Cour d’appel de Metz, 3e chambre, tranche un contentieux né d’un contrat de location-maintenance d’un photocopieur conclu en 2016, assorti d’un procès-verbal de réception et d’une clause d’acceptation sans réserve. Le litige porte sur l’exigibilité des loyers, l’indemnité de résiliation et la restitution du matériel dans un contexte de contestation postérieure de la livraison.

Le contrat prévoyait soixante-trois mois de location, un loyer mensuel, et un procès-verbal de réception signé le 25 juin 2016. Le bailleur a mis en demeure le locataire de régler plusieurs échéances par lettre recommandée du 11 février 2019, avant d’assigner en paiement et en restitution. Par jugement du 16 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Metz a constaté la résiliation au 22 février 2019, condamné le locataire aux sommes dues et ordonné la restitution sous astreinte, rejetant la demande de remboursement. Appel a été interjeté, la procédure ayant été radiée puis réinscrite avant l’arrêt commenté.

En cause d’appel, le locataire soutenait n’avoir jamais bénéficié de l’appareil, invoquait l’absence de cause et réclamait le remboursement des prélèvements. Le bailleur opposait la signature du procès-verbal, la clause d’acceptation, l’absence de réserves dans le délai contractuel et l’autonomie de l’obligation de payer. La question posée résidait dans la portée du procès-verbal de réception et du délai de contestation sur l’entrée en vigueur du contrat, et dans la possibilité d’ordonner la restitution en cas de non-détention matérielle du bien.

La Cour retient l’opposabilité de l’acceptation sans réserve et l’exigibilité des sommes, au visa des articles 1103 et 1353 du code civil et de la clause contractuelle, tout en écartant la restitution faute de possession. Elle relève que, selon l’article 2.2 des conditions générales, « la signature du procès-verbal de réception de même que le silence passé un délai de 8 jours à compter de la livraison effective implique pour le locataire l’acceptation sans réserve de l’équipement », en déduisant que « le contrat de location a pris effet le 25 juin 2016 ». S’agissant de la restitution, elle constate sur attestation que l’appareil « n’a pas été laissé chez le client » et déboute en conséquence le bailleur de ce chef.

I. L’effet obligatoire du procès-verbal de réception et la cristallisation de l’acceptation

A. La portée normative de la clause d’acceptation sans réserve

La clause d’acceptation organise la bascule du contrat de la promesse à l’exécution en fixant un mécanisme clair d’agrément. Le texte stipule que « la signature du procès-verbal de réception (…) implique pour le locataire l’acceptation sans réserve de l’équipement », et que le « locataire s’interdisant dès lors toutes protestations quant à (…) l’inexécution totale ou partielle ». La Cour applique l’article 1103 du code civil en consacrant la force obligatoire d’un agencement contractuel classique en location financière.

Le délai de huit jours occupe une place décisive puisqu’il borne la contestation utile de la délivrance et de la conformité. L’absence de réserves, cumulée à la signature, vaut renonciation aux griefs opposables au bailleur, sauf fraude ou vice radical non allégués. La juridiction rappelle sobrement que la preuve pèse sur celui qui se prétend libéré, au sens de l’article 1353, ce qui conduit à écarter une contestation tardive, dénuée de réserves conservatoires ou d’éléments objectifs de non-conformité.

B. La prise d’effet du contrat et l’autonomie de l’obligation de payer

La motivation relie la signature du procès-verbal à la date d’effet de la location, en des termes dépourvus d’ambiguïté: « Il s’en déduit que le contrat de location a pris effet le 25 juin 2016 ». La Cour relève l’absence d’allégations ou de preuves de réserves dans le délai contractuel, puis confirme la résiliation de plein droit après mise en demeure restée infructueuse, conformément à la clause résolutoire.

L’économie triangulaire de la location financière sous-tend cette solution, le bailleur n’assumant ni la délivrance ni la conformité, tandis que le locataire dispose d’actions contre le fournisseur. La décision s’inscrit dans une jurisprudence constante qui protège la sécurité des flux, surtout lorsque le preneur est un professionnel. L’argument tiré de l’état de santé est jugé indifférent à la validité de l’acceptation et à la charge de la preuve, ce qui renforce la prévisibilité du régime sans dissoudre l’examen concret des éléments produits.

II. Les limites de la sanction: l’impossibilité de restituer un bien non détenu

A. La preuve de la non-détention matérielle du matériel loué

Si l’exigibilité des loyers et de l’indemnité s’impose, la restitution appelle un contrôle probatoire distinct, centré sur la possession effective. La Cour retient l’attestation selon laquelle l’appareil « n’a pas été laissé chez le client » et ajoute qu’« aucun élément objectif n’est de nature à remettre en cause la valeur probante de cette déclaration ». La combinaison de ces éléments exclut que le locataire détienne le bien, condition pourtant nécessaire d’une restitution sous astreinte.

La solution protège contre une injonction irréalisable et écarte une contrainte dépourvue d’objet. Elle prévient les astreintes absurdes dans les configurations où le fournisseur a repris le matériel ou ne l’a pas remplacé. Elle incite, en amont, à tracer la chaîne de détention par des procès-verbaux de reprise formalisés, afin d’éviter des conflits ultérieurs sur la garde.

B. L’articulation des remèdes pécuniaires et de la restitution en nature

La Cour maintient les condamnations pécuniaires fondées sur la prise d’effet du contrat et la résiliation, tout en déboutant la demande de restitution. Cette dissociation mesure la sanction à l’aune des preuves disponibles et refuse une addition mécanique des remèdes. Elle confirme ainsi l’indemnité contractuelle et les arriérés, mais neutralise la restitution devenue impossible.

La solution concilie la sécurité des flux financiers avec le réalisme de l’exécution en nature. Elle rappelle que la restitution suppose la garde et que la preuve contraire éteint l’astreinte envisagée. À terme, l’ordonnancement incite le bailleur à activer ses prérogatives de propriétaire auprès du dépositaire effectif, et le preneur à formaliser sans délai toute réserve, afin d’éviter la cristallisation d’une acceptation irréfragable.

Source : Cour de cassation – Base Open Data « Judilibre » & « Légifrance ».

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