Cour d’appel administrative de Paris, le 16 avril 2025, n°24PA03132

La cour administrative d’appel de Paris a rendu une décision importante le 16 avril 2025 concernant la police de la sécurité des immeubles. Cette affaire interroge la régularité d’une procédure de mise en sécurité engagée sous l’ancien régime puis poursuivie après une réforme législative. Des désordres structurels affectant plusieurs bâtiments ont conduit l’autorité municipale à engager diverses procédures de péril dès l’année deux mille dix-huit. Un arrêté de mise en sécurité a finalement été édicté en janvier deux mille vingt-deux pour prescrire des travaux de réparation indispensables. Le tribunal administratif de Paris a annulé cet acte par un jugement du 10 mai 2024 en raison d’un vice de procédure. L’autorité municipale a alors interjeté appel en soutenant que les garanties contradictoires avaient été respectées lors des étapes initiales de l’instruction. La juridiction d’appel devait déterminer si l’absence de transmission d’un rapport technique récent, établi juste avant l’arrêté, entachait la légalité de la mesure de police. La Cour confirme l’annulation en jugeant que l’omission de ce document prive les administrés d’une garantie essentielle de défense. L’étude de la continuité des obligations procédurales précédera l’analyse de la sanction retenue par les juges d’appel face à l’irrégularité constatée.

I. L’exigence de la procédure contradictoire lors de la transition normative

L’entrée en vigueur de l’ordonnance du 16 septembre 2020 a profondément modifié le cadre juridique des polices de la sécurité et de la salubrité. Les juges soulignent que toute procédure commencée avant le 1er janvier 2021 doit se poursuivre selon les nouvelles règles si aucun arrêté n’a été notifié.

A. L’application immédiate du nouveau cadre réglementaire Le litige souligne l’importance des dispositions transitoires prévues par le décret du 24 décembre 2020 relatif à l’harmonisation des polices des immeubles. La Cour rappelle que l’autorité compétente doit désormais « informer les personnes tenues d’exécuter les mesures prescrites des motifs » qui justifient l’action publique. Cette obligation d’information s’impose même lorsque l’administration avait déjà initié des échanges sous l’empire de la législation antérieure. L’arrêt précise que les nouvelles exigences de forme garantissent une meilleure protection des droits des propriétaires face aux prérogatives de puissance publique. La commune ne pouvait donc pas se contenter des courriers envoyés en deux mille dix-neuf pour valider sa décision de deux mille vingt-deux.

B. La persistance des obligations de l’administration durant l’instruction L’autorité requérante soutenait que le délai écoulé depuis les premières mises en demeure ne devait pas lui être opposable pour invalider la procédure contradictoire. Cependant, les juges estiment que la continuité de l’instruction impose une actualisation régulière des informations transmises aux administrés concernés par les mesures. La sécurité juridique des propriétaires dépend de la connaissance précise des griefs techniques retenus par les services municipaux tout au long de l’examen. Une procédure de péril ne saurait rester figée alors que l’état du bâtiment évolue ou que de nouvelles constatations architecturales sont effectuées. La rigueur procédurale constitue ainsi le corollaire nécessaire de la gravité des travaux imposés par l’autorité de police administrative.

II. La sanction du défaut de communication d’un élément déterminant

L’annulation de l’arrêté repose sur l’identification d’une irrégularité substantielle ayant empêché les copropriétaires de discuter utilement les motifs de l’acte administratif.

A. La qualification du rapport technique comme pièce nouvelle et décisive Le service des architectes de sécurité a établi un nouveau rapport en avril deux mille vingt-et-un pour constater la persistance des désordres structurels. La Cour juge ce document comme étant « constitutif d’un élément nouveau et déterminant sur lequel se fonde l’arrêté attaqué » par la municipalité. Cette pièce technique apportait des précisions essentielles sur les défaillances du mur séparatif et sur l’état de la souche de cheminée. En omettant de transmettre ce rapport, l’administration a soustrait au débat contradictoire le fondement matériel même de sa décision de mise en sécurité. La pertinence des mesures de police dépend pourtant de la confrontation des expertises techniques avec les observations des parties privées.

B. La privation d’une garantie effective fondant l’annulation de l’arrêté Le non-respect des formalités prévues par le code de la construction et de l’habitation entraîne ici l’illégalité de l’acte administratif contesté devant le juge. La Cour considère que le syndicat a été « effectivement privé de la garantie prévue par l’article R. 551-3 » en raison de cette carence. Cette solution s’inscrit dans la jurisprudence classique sanctionnant les vices de procédure qui ont une influence sur le sens de la décision. L’absence de débat sur un rapport d’expertise nouveau empêche les propriétaires de proposer éventuellement des solutions alternatives ou de contester le péril. L’arrêt confirme ainsi que la protection des occupants ne justifie pas de s’affranchir du respect scrupuleux des droits de la défense.

Source : Cour de cassation – Base Open Data « Judilibre » & « Légifrance ».

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