La Cour administrative d’appel de Paris, par un arrêt rendu le 12 février 2025, s’est prononcée sur le contentieux relatif au raccordement obligatoire des immeubles au réseau public d’assainissement.
Une propriétaire avait sollicité une exonération de cette obligation en raison de la configuration de son terrain situé en contrebas de la voie publique.
Le maire d’une collectivité territoriale a rejeté implicitement son recours gracieux tendant à obtenir cette dispense malgré les contraintes techniques alléguées par l’intéressée.
Saisi par la propriétaire, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a annulé cette décision de rejet par un jugement rendu en date du 11 mai 2023.
La commune a alors interjeté appel devant la juridiction parisienne en contestant tant la recevabilité de la requête que le bien-fondé de l’annulation prononcée.
Elle soutenait notamment l’absence de décision administrative préalable et l’absence de preuves suffisantes concernant le caractère excessif des travaux de raccordement imposés.
Le litige porte sur l’interprétation des dispositions du code de la santé publique régissant les cas de dispense exceptionnelle au principe du raccordement forcé.
La question posée est de savoir si la nécessité d’installer un système de relevage coûteux constitue une difficulté excessive justifiant une exonération légale.
La juridiction d’appel confirme le jugement de première instance en retenant que le coût estimé et les défaillances du réseau local justifient la dispense.
**I. L’affirmation du caractère conditionnel de l’obligation de raccordement**
L’arrêt précise d’abord le cadre juridique strict entourant le raccordement des habitations aux réseaux publics de collecte des eaux usées domestiques.
*A. Le rappel des dispositions législatives et de leurs tempéraments*
Le code de la santé publique dispose que le raccordement des immeubles aux réseaux publics de collecte est obligatoire dans un délai de deux ans.
Cette règle de salubrité publique connaît toutefois des exceptions encadrées par les textes réglementaires pour les immeubles dont le branchement s’avère techniquement complexe.
Les juges rappellent que seuls peuvent être soumis à cette exigence les bâtiments dont le raccordement « ne comporte pas de difficultés excessives ».
Cette formulation jurisprudentielle vient tempérer la rigueur du principe législatif en introduisant un critère de proportionnalité entre l’objectif visé et les contraintes individuelles.
*B. L’interprétation souveraine du critère des difficultés excessives*
La notion de difficultés excessives permet de prendre en compte les obstacles matériels empêchant un écoulement naturel des eaux vers l’ouvrage public collectif.
L’arrêt souligne que l’exonération peut être accordée si l’immeuble est équipé d’une installation d’assainissement autonome conforme aux prescriptions environnementales et sanitaires en vigueur.
La charge de la preuve repose initialement sur l’administration mais le propriétaire doit fournir des éléments probants concernant les spécificités de son terrain.
Cette approche garantit un équilibre entre l’impératif écologique de traitement collectif des eaux et le respect du droit de propriété des administrés.
**II. La reconnaissance des contraintes techniques et financières justifiant l’exonération**
La décision s’appuie sur une analyse factuelle détaillée pour valider le caractère déraisonnable des travaux exigés par la puissance publique dans cette espèce.
*A. L’appréciation concrète du coût des installations de relevage*
La cour relève que la maison se situe en contrebas du réseau communal, ce qui impose impérativement un dispositif de relevage mécanique des eaux.
Le devis produit mentionne un coût significatif incluant deux pompes de relevage et un groupe électrogène de secours pour parer aux coupures d’électricité.
Les juges estiment que ce montant « n’est pas excessif » au regard des nécessités techniques propres à la zone géographique et aux contraintes locales.
L’absence de contre-expertise technique ou de préconisations alternatives de la part de la collectivité affaiblit considérablement la position défendue par l’appelante.
*B. La préservation des droits du propriétaire face aux insuffisances du réseau*
L’arrêt prend en considération le rapport d’inspection révélant des non-conformités et des désordres sur le tronçon concerné du réseau public d’assainissement collectif.
Il n’est pas démontré que l’installation autonome existante présenterait des risques de pollution immédiate pour le milieu marin environnant ou les nappes phréatiques.
La juridiction rejette par conséquent la requête de la commune en confirmant que la propriétaire est fondée à solliciter une dispense de raccordement.
Cette solution témoigne d’une volonté de ne pas faire peser sur les particuliers le coût de réseaux publics défaillants ou manifestement inadaptés.