Cour d’appel administrative de Marseille, le 6 mars 2025, n°24MA02557

Par un arrêt du 6 mars 2025, la Cour administrative d’appel de Marseille précise les conditions de recevabilité d’un recours contre un refus de raccordement.

Des administrés sollicitaient le branchement de leur parcelle au réseau d’eau potable après avoir supprimé les constructions édifiées sans autorisation d’urbanisme sur le terrain.

L’administration avait opposé un nouveau rejet, identique à une décision devenue définitive à la suite d’un précédent jugement rendu par la juridiction de premier ressort.

Le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur requête par une ordonnance du 5 août 2024 en retenant le caractère confirmatif de la décision contestée.

La juridiction d’appel doit déterminer si la disparition de l’irrégularité matérielle constitue un changement de circonstance suffisant pour écarter l’irrecevabilité du recours pour excès de pouvoir.

Elle juge que la remise en conformité des lieux autorise un réexamen de la situation et annule par conséquent l’ordonnance de rejet rendue en première instance.

L’arrêt s’appuie sur la caractérisation souveraine d’un changement de circonstances de fait (I) justifiant le plein rétablissement du droit au recours des administrés (II).

I. La caractérisation souveraine d’un changement de circonstances de fait

A. L’exigence d’un élément nouveau pour écarter le caractère confirmatif

La notion de décision confirmative suppose une identité d’objet et d’arguments entre deux actes administratifs successifs intervenus sans modification du contexte juridique ou matériel.

La Cour administrative d’appel de Marseille rappelle qu’une décision « revêt un caractère confirmatif » dès lors qu’aucun changement n’est survenu dans les circonstances de droit ou de fait.

Cette stabilité empêche l’ouverture d’un nouveau délai de recours si la première décision de rejet n’a pas été contestée utilement dans les délais légaux impartis.

En l’espèce, le premier refus de la commune se fondait sur l’illégalité manifeste des constructions privées au regard des règles impératives du code de l’urbanisme.

B. La preuve matérielle de la mise en conformité de la parcelle

Le juge souligne que les propriétaires ont « fait procéder à la dépose des constructions qu’ils avaient réalisées sans les autorisations d’urbanisme requises » après le refus initial.

Cette modification matérielle de l’état du terrain, attestée par un procès-verbal de constat, constitue un fait nouveau essentiel pour l’appréciation du droit au raccordement.

L’autorité administrative ne peut dès lors plus se borner à réitérer son rejet antérieur sans tenir compte de la mise en conformité effective de la parcelle.

Le constat d’une évolution significative de la situation d’espèce écarte l’exception d’irrecevabilité et impose une analyse renouvelée des prétentions soulevées par les requérants à l’instance.

II. Le rétablissement nécessaire du droit au recours contentieux

A. L’exclusion de l’irrecevabilité par la reconnaissance d’un acte nouveau

Le caractère non confirmatif du second refus permet aux administrés de contester à nouveau la légalité de l’acte devant la juridiction administrative compétente pour en connaître.

L’arrêt affirme que ces « changements font obstacle à ce que la décision contestée soit regardée comme purement confirmative » du rejet implicite né plusieurs années auparavant.

La suppression de l’entrave matérielle réactive ainsi le droit à un procès équitable en offrant la possibilité de discuter le bien-fondé de la position administrative.

Cette solution protège les administrés contre une cristallisation injustifiée de situations passées alors que les motifs ayant justifié le rejet initial ont disparu par leur action.

B. L’annulation de l’ordonnance et le renvoi devant les premiers juges

La Cour administrative d’appel de Marseille décide d’annuler l’ordonnance d’irrecevabilité car le président de la chambre a commis une erreur d’appréciation sur la nature du litige.

Le juge d’appel refuse toutefois de statuer immédiatement au fond et préfère « renvoyer l’affaire devant le tribunal administratif de Marseille pour qu’il statue sur leur demande ».

Cette technique de cassation avec renvoi préserve le double degré de juridiction en permettant un examen complet des moyens de légalité interne par les premiers juges.

Les prétentions relatives aux dommages et intérêts pour résistance abusive seront également débattues lors de la nouvelle instruction menée devant le tribunal administratif de Marseille.

Source : Cour de cassation – Base Open Data « Judilibre » & « Légifrance ».

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