La Cour administrative d’appel de Marseille a rendu, le 5 juin 2025, un arrêt portant sur un permis de construire délivré sous le règlement national d’urbanisme. Des pétitionnaires ont sollicité l’autorisation d’édifier une maison individuelle avec garage sur une parcelle située dans une commune dépourvue de plan local d’urbanisme. Le représentant de l’État dans le département a émis un avis conforme défavorable, invoquant des risques d’incendie et une méconnaissance des règles d’urbanisation. Malgré cette opposition, l’autorité municipale a accordé le permis de construire par un arrêté en date du 23 janvier 2020 au profit des demandeurs. Saisi d’un déféré, le tribunal administratif de Marseille a prononcé l’annulation de cet acte administratif par un jugement rendu en date du 1er février 2024. Les bénéficiaires de l’autorisation ont interjeté appel, soutenant que le terrain se situe dans un secteur déjà urbanisé et protégé contre les risques d’incendie. La juridiction d’appel doit déterminer si l’implantation d’une construction dans une zone d’aléa moyen, entourée de bâtis existants, porte une atteinte à la sécurité publique. L’examen de la sécurité publique précède l’analyse de l’insertion du projet dans les parties urbanisées pour confirmer la validité du permis de construire contesté.
I. L’appréciation souveraine des risques d’atteinte à la sécurité publique
A. L’interprétation factuelle du risque d’incendie de forêt
Le juge administratif vérifie si le projet est de nature à porter atteinte à la sécurité publique en application de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme. La Cour rappelle qu’il faut « tenir compte tant de la probabilité de réalisation de ces risques que de la gravité de leurs conséquences, s’ils se réalisent ». En l’espèce, les pièces démontrent que la parcelle litigieuse est classée dans une zone d’aléa subi moyen selon la cartographie des services de l’État. Les magistrats observent que le terrain s’inscrit dans un environnement dont les abords immédiats sont déjà construits au nord et également vers l’est. Ainsi, cette situation géographique particulière atténue la dangerosité potentielle du sinistre initialement identifié lors de l’instruction technique de la demande d’autorisation.
B. Le contrôle de la légalité de l’avis conforme préfectoral
L’autorité préfectorale avait opposé un avis défavorable contraignant en se fondant sur l’impossibilité présumée d’accès pour les véhicules de secours et de lutte. Toutefois, la Cour infirme cette analyse en relevant que les voies de desserte présentent une largeur suffisante pour le passage aisé des engins motorisés. Elle souligne la présence d’une infrastructure ferroviaire à proximité dont les abords sont régulièrement défrichés et entretenus par les services de la société nationale. Dès lors, le juge estime que le maire n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en s’écartant des conclusions de l’avis conforme préfectoral initial. La conformité aux exigences de sécurité publique permet alors d’examiner l’insertion du projet au sein des parties actuellement urbanisées de la commune concernée.
II. La consécration de l’insertion du projet dans les parties urbanisées
A. La définition matérielle des secteurs actuellement urbanisés
En l’absence de document d’urbanisme local, les constructions ne peuvent être autorisées que dans les « parties urbanisées de la commune » selon le code. Par ailleurs, la jurisprudence définit ces zones comme des « parties du territoire communal qui comportent déjà un nombre et une densité significatifs de constructions ». La Cour administrative d’appel constate que le projet se situe dans le prolongement d’un hameau constitué présentant une urbanisation particulièrement dense et continue. En outre, cette reconnaissance s’appuie sur une analyse technique des parcelles confirmée par les données librement accessibles sur le portail cartographique de l’État. Le caractère urbanisé du secteur justifie l’application de la règle de constructibilité malgré l’absence de plan local d’urbanisme opposable aux tiers intéressés.
B. L’absence d’extension illicite de l’urbanisation en zone de règlement national
L’interdiction de construire hors des parties urbanisées vise à prévenir le mitage du territoire et à préserver les espaces naturels ou agricoles communaux. Ainsi, les juges précisent que la réalisation de la maison individuelle n’entraînera pas une extension de l’urbanisation car la limite est définie par une voie. Bien que la parcelle se trouve à l’extrémité de la zone bâtie, elle demeure intégrée au tissu urbain existant sans créer de discontinuité géographique. Enfin, la décision souligne que l’opération respecte les objectifs de densification modérée sans porter atteinte à l’équilibre des espaces ruraux environnants du village. Le jugement de première instance est donc annulé par la Cour, rétablissant ainsi la pleine validité du permis de construire délivré par l’autorité municipale.