Cour d’appel administrative de Lyon, le 9 juillet 2025, n°25LY00152

La Cour administrative d’appel de Lyon, par une décision du 9 juillet 2025, délimite les contours du sursis à statuer opposé à une demande d’urbanisme.

Une société dépose une demande de permis de construire pour soixante logements tandis que l’autorité communale décide de surseoir à statuer sur cette sollicitation.

Le tribunal administratif de Grenoble prononce l’annulation de cet arrêté le 3 décembre 2024 et ordonne au maire de délivrer l’autorisation de construire demandée.

La collectivité publique conteste cette solution devant la juridiction d’appel en faisant valoir l’état d’avancement suffisant de son futur plan local d’urbanisme.

Le litige repose sur l’appréciation du risque de compromission que fait peser un projet de forte densité sur les orientations d’aménagement en cours d’élaboration.

La Cour administrative d’appel de Lyon infirme le jugement de première instance en validant la légalité de la décision de surseoir à statuer du maire.

L’étude de cette décision nécessite d’analyser d’abord les conditions de recours au sursis à statuer avant d’examiner l’appréciation concrète du risque de compromission du futur plan.

**I. La régularité formelle du sursis fondée sur la maturité de la planification**

**A. Un état d’avancement suffisant du futur document d’urbanisme**

L’article L. 153-11 du code de l’urbanisme autorise le sursis à statuer sur les constructions de nature à compromettre l’exécution du futur plan local d’urbanisme.

Cette faculté est ouverte dès lors qu’un débat sur les orientations générales du projet d’aménagement et de développement durables a eu lieu au conseil municipal.

En l’espèce, les juges notent que ce débat s’est tenu le 20 décembre 2022 avant l’intervention de la décision de sursis le 25 octobre 2023.

La juridiction considère alors que « le futur PLU était ainsi suffisamment avancé » pour que l’autorité compétente puisse apprécier la conformité du projet immobilier.

L’instauration d’un périmètre d’étude renforce ici la légitimité de l’administration à protéger le devenir d’un secteur géographique spécifique contre une urbanisation jugée trop prématurée.

**B. L’intégration des orientations du projet d’aménagement et de développement durables**

Le projet d’aménagement et de développement durables ne possède pas de valeur contraignante directe mais il sert néanmoins de support légal à la décision administrative.

L’autorité compétente doit impérativement prendre en compte les orientations de ce document dès lors qu’elles traduisent un état stabilisé du futur document d’urbanisme communal.

L’arrêt souligne que la recherche de la cohérence urbaine constitue l’une des composantes fortes du parti d’urbanisme retenu par les élus de la commune.

La valorisation des secteurs en renouvellement urbain doit se faire à la condition de présenter des projets cohérents par rapport au contexte urbain environnant.

**II. La caractérisation du risque de compromission du projet urbain futur**

**A. La méconnaissance des objectifs de préservation de la trame urbaine**

Le terrain d’assiette de l’opération se situe dans un îlot résidentiel composé majoritairement d’un habitat pavillonnaire traditionnel de gabarit et de taille limités.

Le projet prévoit la réalisation de soixante logements pour une surface de plancher totale de 4 345 mètres carrés répartis sur plusieurs bâtiments de grande hauteur.

Une telle densification induit nécessairement des impacts substantiels sur le fonctionnement du quartier ainsi que sur la qualité de vie des habitants résidant à proximité.

Les juges estiment que l’opération est « de nature à compromettre l’exécution du futur PLU » par sa volumétrie jugée particulièrement excessive pour le secteur concerné.

Cette solution protège la trame urbaine traditionnelle contre une mutation structurelle qui serait contraire aux orientations paysagères définies dans le cadre de la révision.

**B. L’atteinte portée à la stratégie de temporisation de la production résidentielle**

L’autorité municipale exprime la volonté de temporiser la production de logements à court terme afin de favoriser l’insertion sociale et économique des nouveaux habitants.

Le projet en litige correspond précisément au volume annuel de production envisagé pour l’ensemble du territoire à partir de l’année 2026 selon le plan.

L’arrêt souligne que l’opération immobilière viendrait ainsi « obérer d’un dixième le volume de production prévu pour les dix années à venir » par la collectivité.

La validation du sursis permet de garantir le respect de la temporalité choisie pour accompagner la croissance démographique sans saturer immédiatement les infrastructures existantes.

Le maire n’a donc pas entaché sa décision d’une erreur d’appréciation en refusant de statuer immédiatement sur la demande de permis de construire présentée.

Source : Cour de cassation – Base Open Data « Judilibre » & « Légifrance ».

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