Par un arrêt du 23 mai 2025, la Cour administrative d’appel de Marseille précise les conditions de légalité d’une procédure de sélection préalable à l’occupation domaniale. Le litige opposait deux structures économiques pour l’obtention d’une autorisation d’occupation temporaire portant sur l’exploitation d’activités nautiques en bordure d’une plage méditerranéenne. L’administration avait décidé de ne pas renouveler une sous-concession communale pour reprendre la gestion directe du domaine public maritime par une procédure de publicité. La société évincée contestait le rejet de son offre en invoquant l’irrégularité de la candidature concurrente ainsi qu’une erreur manifeste dans l’appréciation des dossiers. Saisi en premier ressort, le tribunal administratif de Nice avait rejeté sa demande par un jugement rendu le 9 avril 2024. La requérante a alors interjeté appel le 17 juin 2024 en soutenant que les premiers juges avaient omis de statuer sur certains moyens essentiels. La juridiction d’appel devait alors déterminer si l’attribution d’une emprise supérieure à celle annoncée ou une erreur d’appréciation sectorielle viciaient nécessairement la sélection. Le juge d’appel annule le jugement pour irrégularité mais rejette la requête au fond en considérant que les vices invoqués demeuraient sans incidence déterminante.
I. L’exigence de transparence tempérée par la souplesse des modalités d’occupation
A. La conformité de l’offre retenue aux mesures de publicité préalable
L’avis de publicité préalable diffusé par le représentant de l’État prévoyait l’occupation d’une superficie totale de six cent soixante-dix-sept mètres carrés constituée de dalles bétonnées. La société attributaire a toutefois obtenu une autorisation portant sur une surface de huit cent cinquante-quatre mètres carrés suite à l’acceptation de son offre technique. Le juge considère toutefois que l’installation d’un ponton démontable constitue un aménagement précaire permis par l’avis de publicité sans modifier l’emprise au sol réelle. Cette différence de surface « n’augmentant pas l’emprise au sol de l’occupation, doit être regardée comme ayant été permise par l’avis de publicité » initial. L’acceptation de cette offre n’a donc pas conduit l’administration à s’écarter irrégulièrement des termes de la mise en concurrence précédemment organisée par les services.
B. Le rejet de l’irrecevabilité tirée du comportement antérieur de l’attributaire
La requérante soutenait également que la candidature de sa concurrente était irrecevable en raison de manquements passés aux prescriptions des titres d’occupation du domaine. Elle invoquait notamment des contraventions de grande voirie ainsi que l’installation irrégulière de mobiliers sur le passage réservé à la libre circulation des piétons. La Cour administrative d’appel de Marseille écarte ce grief en soulignant qu’aucune condition relative à la probité passée des candidats ne figurait dans l’avis. La juridiction précise que cette circonstance « n’était pas de nature à rendre sa candidature irrecevable dès lors qu’aucune condition ne figurait à cet égard ». Le respect des règles d’occupation antérieures ne constituait pas un critère de sélection opposable aux candidats en l’absence de mention explicite dans le règlement.
II. La validation de la sélection finale malgré l’erreur d’appréciation partielle
A. La neutralisation de l’erreur commise sur la vocation maritime du site
L’administration avait initialement estimé que l’offre de la requérante manquait de cohérence avec la vocation maritime du site en raison de l’usage d’engins motorisés. Le juge relève pourtant qu’un arrêté préfectoral récent réservait précisément un chenal aux sports nautiques de vitesse au droit des aménagements projetés par cette société. Le directeur départemental ne pouvait donc légalement opposer une interdiction théorique des moteurs pour déprécier la note technique attribuée à la candidate évincée lors de l’examen. Cette erreur manifeste d’appréciation n’entraîne cependant pas l’annulation de la décision car elle ne modifie pas l’ordre final de classement entre les deux concurrents. Une notation maximale sur ce point précis « n’aurait pas permis d’inverser le classement final » au regard de l’écart de points séparant les deux dossiers.
B. La prépondérance des critères de cohérence fonctionnelle et de capacité financière
La décision de rejet se justifiait par des lacunes structurelles dans le projet de la requérante qui ne proposait aucun aménagement pour une partie de l’emprise. Son dossier remis lors de la phase de sélection « présentait ainsi une cohérence fonctionnelle très peu satisfaisante » selon les constatations souveraines opérées par la Cour. L’analyse des garanties financières révélait en outre une fragilité importante avec des capitaux propres nettement inférieurs à ceux de la société concurrente attributaire du titre. Cette situation économique précaire pouvait conduire l’administration à « douter de sa capacité à assumer la charge d’une remise en état naturel du domaine public ». Le juge d’appel confirme ainsi que l’administration dispose d’un large pouvoir d’appréciation pour choisir l’occupant offrant les meilleures garanties de gestion domaniale.