Conseil constitutionnel, Décision n° 2023-852 DC du 20 juillet 2023

    Par sa décision numéro 2023-852 DC du 20 juillet 2023, le Conseil constitutionnel a examiné la conformité d’une loi portant sur un plan d’urbanisme intercommunal. Cette norme législative visait à assurer la primauté d’un décret antérieur relatif à une liaison autoroutière sur les dispositions contraires d’un document d’urbanisme. Un décret avait déclaré d’utilité publique des travaux routiers et mis en compatibilité les plans d’urbanisme de plusieurs communes d’un département frontalier. Un établissement public de coopération intercommunale a ensuite approuvé un plan d’urbanisme global sans intégrer les conséquences juridiques de ce projet d’infrastructure. Saisi par soixante députés, le juge constitutionnel devait déterminer si cette mesure législative constituait une validation portant atteinte à la séparation des pouvoirs. Les requérants invoquaient également une méconnaissance de la Charte de l’environnement ainsi que du principe fondamental de libre administration des collectivités territoriales. Le Conseil a validé la loi en distinguant la régularisation de la validation législative tout en précisant le statut des établissements publics de coopération intercommunale.

I. L’exclusion du régime restrictif des validations législatives

A. Le caractère non rétroactif de la disposition contestée

    Le Conseil constitutionnel souligne que les dispositions litigieuses s’appliquent uniquement à compter de l’entrée en vigueur de la loi déférée devant lui. Il estime que l’article unique « n’a ni pour objet ni pour effet de modifier rétroactivement ou de valider le décret » concerné. Cette précision écarte l’application de la jurisprudence rigoureuse relative aux lois de validation qui imposent la preuve d’un motif impérieux d’intérêt général. Le législateur s’est borné à organiser pour l’avenir la coexistence de deux normes administratives dont les contenus s’avéraient inconciliables dans l’ordonnancement juridique.

B. L’inopérance des griefs fondés sur la séparation des pouvoirs

    L’absence de rétroactivité entraîne l’échec des moyens soulevés par les parlementaires concernant la méconnaissance de l’article seize de la Déclaration de 1789. Le juge affirme que « le grief tiré de la méconnaissance des conditions auxquelles sont subordonnées les validations législatives ne peut qu’être écarté comme inopérant ». La séparation des pouvoirs demeure préservée puisque la loi ne vient pas interférer avec des décisions de justice ayant déjà acquis la force de chose jugée. La mesure législative n’est pas une injonction au juge mais une règle de fond s’imposant désormais aux futurs litiges relatifs au plan d’urbanisme. Cette absence de grief sérieux conduit à l’examen de la portée de la décision sur l’autonomie des établissements publics et la Charte de l’environnement.

II. La limitation des prérogatives de l’établissement public de coopération intercommunale

A. L’absence de protection constitutionnelle au titre de la libre administration

    L’analyse porte sur la situation juridique de l’organisme public ayant élaboré le plan local d’urbanisme intercommunal dont l’application se trouve désormais partiellement entravée. Le Conseil constitutionnel rappelle que « les établissements publics de coopération intercommunale ne constituent pas des collectivités territoriales au sens de l’article 72 de la Constitution ». Cette distinction fondamentale rend inopérant le grief relatif à la libre administration invoqué par les requérants contre la primauté accordée au décret gouvernemental. La loi peut limiter les compétences d’un tel établissement sans avoir à respecter les garanties spécifiques accordées aux communes et aux départements.

B. Le maintien des exigences environnementales applicables aux travaux publics

    Le juge constitutionnel vérifie si la régularisation législative permet de contourner les obligations de protection de la nature inscrites dans la Charte de l’environnement. La décision précise que les dispositions contestées n’ont pas pour effet « de dispenser les travaux » du respect des prescriptions environnementales fixées par les textes. La hiérarchie des normes reste sauve car l’infrastructure routière demeure soumise aux évaluations et aux contrôles administratifs classiques prévus pour la sauvegarde des écosystèmes. La loi ne constitue pas un blanc-seing accordé à l’administration mais une simple mise en cohérence technique des documents d’urbanisme au profit de l’intérêt général.

Source : Cour de cassation – Base Open Data « Judilibre » & « Légifrance ».

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