Cour d’appel de Nîmes, le 28 août 2025, n°23/00510
Now using node v22.15.1 (npm v10.8.2) Utilisation de Node.js v20.19.4 et npm 10.8.2 Codex est déjà installé. Lancement de Codex… La Cour d’appel de Nîmes, 28 août 2025, confirme le jugement du tribunal judiciaire de Mende du 23 novembre 2022 à propos d’un désenclavement agricole. Le litige oppose le propriétaire des parcelles enclavées à son voisin dont les fonds portent le passage, tandis que d’autres propriétaires sont visés subsidiairement pour un tracé alternatif. L’affaire naît d’une expertise ordonnée en 2016, dont le rapport en 2019 fixe plusieurs options et chiffre les travaux. Le premier juge a retenu l’enclave de deux groupes de parcelles, fixé l’assiette de la servitude par prescription trentenaire au profit du passage existant sur les fonds voisins, rejeté la revendication de propriété d’une portion de parcelle et écarté toute indemnité, l’action étant prescrite. L’appelant conteste l’enclave de trois parcelles en invoquant des accès réalisables, récuse la prescription de l’assiette et réclame le tracé court sur une parcelle voisine pour les deux autres. L’intimée, venant aux droits de son époux, soutient l’enclave économique et la prescription, et forme appel incident sur la revendication et les dommages. La cour répond que l’enclave s’apprécie aussi par le coût des travaux, que l’assiette peut être acquise par usage trentenaire lorsque l’enclave est constatée, et que l’action indemnitaire est prescrite. Elle refuse enfin la revendication de propriété, la possession à titre de fermier ne valant pas usucapion.
I. Les critères d’enclave et la fixation de l’assiette
A. Le critère économique et le périmètre d’appréciation La cour rappelle le principe suivant: « Il est constant qu’il y a enclave lorsque l’accès à la voie publique impose des travaux d’un coût disproportionné par rapport à la valeur de la propriété. » Le contrôle porte, non sur l’ensemble du tènement, mais sur les seules parcelles à désenclaver. Cette précision est nette: « A ce propos, il sera observé que la notion de propriété doit s’entendre des seules parcelles dont le désenclavement est sollicité […]. » L’expertise retient des tracés internes exigeant déblais, remblais, ouvrages hydrauliques et structure de chaussée, pour des coûts dépassant la valeur vénale des terres. La cour en déduit rigoureusement que « Aussi, le coût des travaux, tel que fixé par l’expert, apparaît disproportionné par rapport à la valeur des parcelles ». L’enclave est dès lors juridiquement caractérisée, comme l’énonce la motivation: « En considération de l’ensemble de ces éléments, l’état d’enclave des parcelles […] est donc caractérisé au sens de l’article 682 du code civil. » La solution est pédagogique, car elle articule le besoin concret d’exploitation agricole et la mesure économique des travaux requis.
Cette appréciation neutralise les devis lacunaires fournis par le voisin, limités au terrassement et ignorant les matériaux et ouvrages indispensables. La mention des fluctuations de prix agricoles ne renverse pas l’analyse, faute d’éléments probants sur la période utile. La méthode d’évaluation est ainsi consolidée, car elle saisit l’économie réelle du désenclavement sans diluer la comparaison dans le reste du patrimoine.
B. La prescription trentenaire de l’assiette et l’office de l’article 683 Une fois l’enclave établie au sens de l’article 682, la cour admet l’invocation de l’article 685 pour fixer l’assiette par prescription acquisitive. Les photographies aériennes montrent un passage constant depuis 1963, corroboré par les relevés d’exploitation et les attestations. La possession, continue et non équivoque, n’est pas détruite par l’usage concomitant du chemin par le voisin, l’ambiguïté alléguée restant vaine au regard de l’usage agricole. La conclusion est ferme: « Ainsi, il convient de dire que l’assiette revendiquée a été prescrite. » La largeur de quatre mètres est confirmée, compte tenu des engins nécessaires et de l’usage agricole normal, ce que l’expertise a précisément motivé.
L’articulation avec l’article 683 s’éclaire alors. Les critères de plus court chemin et moindre dommage guident le choix à défaut d’assiette acquise. Ici, l’acquisition trentenaire rend inutiles les tracés alternatifs, y compris le tracé court sur le fonds voisin proposé à titre subsidiaire. La cour ne s’y attarde qu’en marge, en rappelant les contraintes d’urbanisme et l’atteinte excessive aux pâturages, ce qui confirme l’économie de la solution principale.
II. Les effets pratiques et les limites de la solution
A. L’indemnité, la largeur et la pérennité de l’usage La cour applique l’alinéa 2 de l’article 685, qui dissocie le maintien du passage de l’action indemnitaire désormais prescrite. Elle le dit sans détour pour les deux groupes de parcelles: « Pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés, la demande d’indemnité est prescrite. » L’effet utile de la prescription est double. Elle fige l’assiette et le mode du passage, et purifie l’économie du litige, en évitant une indemnisation tardive qui viendrait déstabiliser la desserte établie. La solution sur la largeur confirme l’exigence d’un passage suffisant, proportionné aux contraintes d’exploitation, sans excès ni insuffisance.
Cette approche renforce la sécurité des exploitations rurales. Elle clôt un contentieux ancien en s’appuyant sur des indices objectifs, répétés et concordants, tout en respectant la fonction de la servitude légale: assurer la desserte complète du fonds, sans transformer le fonds servant en voie publique.
B. La revendication de propriété et l’exigence d’animus La demande d’usucapion sur une fraction de parcelle contiguë est rejetée, la possession ayant été exercée comme fermier jusqu’à l’acquisition de la parcelle voisine. La cour rappelle la nécessité de l’animus domini, absent chez le preneur à bail. La formule vaut avertissement méthodologique: « Jusque-là, il est constant qu’ils exploitaient ladite parcelle dans le cadre d’un bail à ferme et s’ils ont, à cette occasion, exploité partie de la parcelle cadastrée E [Cadastre 21] jouxtant la parcelle cadastrée E [Cadastre 22], ils ne sont pas fondés cependant à soutenir qu’en raison de cette exploitation, leur auteur aurait, par leur intermédiaire et sans qu’il soit établi l’existence en sa personne d’un animus, lui-même prescrit la partie revendiquée pour considérer in fine que la prescription serait acquise à leur profit. » Le raisonnement se tient, car la possession à titre précaire ne se convertit pas en possession utile sans interversion claire, non démontrée ici.
Cette limite rappelle que la cohérence du droit des biens commande de distinguer la stabilité des servitudes d’enclave, consolidées par l’usage et l’expertise, et l’extraordinaire mode d’acquisition qu’est l’usucapion, soumis à des conditions strictes. La décision stabilise les accès ruraux tout en préservant l’exigence probatoire attachée à la revendication de propriété.
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Utilisation de Node.js v20.19.4 et npm 10.8.2
Codex est déjà installé.
Lancement de Codex…
La Cour d’appel de Nîmes, 28 août 2025, confirme le jugement du tribunal judiciaire de Mende du 23 novembre 2022 à propos d’un désenclavement agricole. Le litige oppose le propriétaire des parcelles enclavées à son voisin dont les fonds portent le passage, tandis que d’autres propriétaires sont visés subsidiairement pour un tracé alternatif. L’affaire naît d’une expertise ordonnée en 2016, dont le rapport en 2019 fixe plusieurs options et chiffre les travaux. Le premier juge a retenu l’enclave de deux groupes de parcelles, fixé l’assiette de la servitude par prescription trentenaire au profit du passage existant sur les fonds voisins, rejeté la revendication de propriété d’une portion de parcelle et écarté toute indemnité, l’action étant prescrite. L’appelant conteste l’enclave de trois parcelles en invoquant des accès réalisables, récuse la prescription de l’assiette et réclame le tracé court sur une parcelle voisine pour les deux autres. L’intimée, venant aux droits de son époux, soutient l’enclave économique et la prescription, et forme appel incident sur la revendication et les dommages. La cour répond que l’enclave s’apprécie aussi par le coût des travaux, que l’assiette peut être acquise par usage trentenaire lorsque l’enclave est constatée, et que l’action indemnitaire est prescrite. Elle refuse enfin la revendication de propriété, la possession à titre de fermier ne valant pas usucapion.
I. Les critères d’enclave et la fixation de l’assiette
A. Le critère économique et le périmètre d’appréciation
La cour rappelle le principe suivant: « Il est constant qu’il y a enclave lorsque l’accès à la voie publique impose des travaux d’un coût disproportionné par rapport à la valeur de la propriété. » Le contrôle porte, non sur l’ensemble du tènement, mais sur les seules parcelles à désenclaver. Cette précision est nette: « A ce propos, il sera observé que la notion de propriété doit s’entendre des seules parcelles dont le désenclavement est sollicité […]. » L’expertise retient des tracés internes exigeant déblais, remblais, ouvrages hydrauliques et structure de chaussée, pour des coûts dépassant la valeur vénale des terres. La cour en déduit rigoureusement que « Aussi, le coût des travaux, tel que fixé par l’expert, apparaît disproportionné par rapport à la valeur des parcelles ». L’enclave est dès lors juridiquement caractérisée, comme l’énonce la motivation: « En considération de l’ensemble de ces éléments, l’état d’enclave des parcelles […] est donc caractérisé au sens de l’article 682 du code civil. » La solution est pédagogique, car elle articule le besoin concret d’exploitation agricole et la mesure économique des travaux requis.
Cette appréciation neutralise les devis lacunaires fournis par le voisin, limités au terrassement et ignorant les matériaux et ouvrages indispensables. La mention des fluctuations de prix agricoles ne renverse pas l’analyse, faute d’éléments probants sur la période utile. La méthode d’évaluation est ainsi consolidée, car elle saisit l’économie réelle du désenclavement sans diluer la comparaison dans le reste du patrimoine.
B. La prescription trentenaire de l’assiette et l’office de l’article 683
Une fois l’enclave établie au sens de l’article 682, la cour admet l’invocation de l’article 685 pour fixer l’assiette par prescription acquisitive. Les photographies aériennes montrent un passage constant depuis 1963, corroboré par les relevés d’exploitation et les attestations. La possession, continue et non équivoque, n’est pas détruite par l’usage concomitant du chemin par le voisin, l’ambiguïté alléguée restant vaine au regard de l’usage agricole. La conclusion est ferme: « Ainsi, il convient de dire que l’assiette revendiquée a été prescrite. » La largeur de quatre mètres est confirmée, compte tenu des engins nécessaires et de l’usage agricole normal, ce que l’expertise a précisément motivé.
L’articulation avec l’article 683 s’éclaire alors. Les critères de plus court chemin et moindre dommage guident le choix à défaut d’assiette acquise. Ici, l’acquisition trentenaire rend inutiles les tracés alternatifs, y compris le tracé court sur le fonds voisin proposé à titre subsidiaire. La cour ne s’y attarde qu’en marge, en rappelant les contraintes d’urbanisme et l’atteinte excessive aux pâturages, ce qui confirme l’économie de la solution principale.
II. Les effets pratiques et les limites de la solution
A. L’indemnité, la largeur et la pérennité de l’usage
La cour applique l’alinéa 2 de l’article 685, qui dissocie le maintien du passage de l’action indemnitaire désormais prescrite. Elle le dit sans détour pour les deux groupes de parcelles: « Pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés, la demande d’indemnité est prescrite. » L’effet utile de la prescription est double. Elle fige l’assiette et le mode du passage, et purifie l’économie du litige, en évitant une indemnisation tardive qui viendrait déstabiliser la desserte établie. La solution sur la largeur confirme l’exigence d’un passage suffisant, proportionné aux contraintes d’exploitation, sans excès ni insuffisance.
Cette approche renforce la sécurité des exploitations rurales. Elle clôt un contentieux ancien en s’appuyant sur des indices objectifs, répétés et concordants, tout en respectant la fonction de la servitude légale: assurer la desserte complète du fonds, sans transformer le fonds servant en voie publique.
B. La revendication de propriété et l’exigence d’animus
La demande d’usucapion sur une fraction de parcelle contiguë est rejetée, la possession ayant été exercée comme fermier jusqu’à l’acquisition de la parcelle voisine. La cour rappelle la nécessité de l’animus domini, absent chez le preneur à bail. La formule vaut avertissement méthodologique: « Jusque-là, il est constant qu’ils exploitaient ladite parcelle dans le cadre d’un bail à ferme et s’ils ont, à cette occasion, exploité partie de la parcelle cadastrée E [Cadastre 21] jouxtant la parcelle cadastrée E [Cadastre 22], ils ne sont pas fondés cependant à soutenir qu’en raison de cette exploitation, leur auteur aurait, par leur intermédiaire et sans qu’il soit établi l’existence en sa personne d’un animus, lui-même prescrit la partie revendiquée pour considérer in fine que la prescription serait acquise à leur profit. » Le raisonnement se tient, car la possession à titre précaire ne se convertit pas en possession utile sans interversion claire, non démontrée ici.
Cette limite rappelle que la cohérence du droit des biens commande de distinguer la stabilité des servitudes d’enclave, consolidées par l’usage et l’expertise, et l’extraordinaire mode d’acquisition qu’est l’usucapion, soumis à des conditions strictes. La décision stabilise les accès ruraux tout en préservant l’exigence probatoire attachée à la revendication de propriété.