La cour administrative d’appel de Marseille, par une décision du 23 juin 2025, statue sur la validité d’une convention d’occupation du domaine public. Une collectivité territoriale et un établissement d’enseignement avaient lancé une mise en concurrence afin d’attribuer l’exploitation d’une cafétéria au sein d’un lycée. Un candidat évincé, qui gérait précédemment cet espace depuis plusieurs années, a sollicité l’annulation de la convention signée avec l’attributaire ainsi qu’une indemnisation financière. Le tribunal administratif de Nice ayant rejeté ses demandes le 30 avril 2024, la société requérante a porté le litige devant le juge d’appel. Le litige porte sur la conformité de l’offre retenue au règlement de la consultation et sur la précision des critères de sélection utilisés par l’administration. La juridiction administrative rejette la requête car la procédure d’attribution n’est pas entachée d’irrégularité et l’éviction ne saurait ouvrir droit à réparation. Ce commentaire analysera d’abord la régularité de la procédure de sélection des candidats avant d’étudier le régime de responsabilité applicable en cas d’éviction du domaine public.
I. La régularité de la procédure de sélection de l’occupant domanial
A. La stricte conformité de l’offre retenue aux prescriptions du cahier des charges
L’appelant soutenait que l’offre sélectionnée incluait des produits interdits par le règlement de la consultation, notamment des boissons et des confiseries non autorisées explicitement par l’administration. Le juge relève pourtant que « l’offre de la société retenue ait fait mention de » friandises « , le détail proposé n’incluait toutefois pas des produits non autorisés ». Cette interprétation permet à l’administration de valider des propositions respectant l’esprit des contraintes sanitaires et environnementales fixées pour les usagers de l’établissement public d’enseignement. L’absence de produits prohibés dans l’offre finale de l’attributaire garantit ainsi le respect des obligations contractuelles imposées par le pouvoir adjudicateur lors de la mise en concurrence.
B. La transparence des critères d’évaluation et de comparaison des offres financières
La contestation portait également sur l’opacité présumée du critère relatif à la qualité professionnelle et sur le traitement des variantes proposées par les différents candidats à l’occupation. La cour administrative d’appel de Marseille souligne qu’un critère est suffisant s’il permet aux candidats d’établir un « mémo des activités et de la logistique prévue » de manière précise. L’administration ne peut prendre en compte que les offres financières conformes au règlement, écartant ainsi toute ambiguïté sur le montant de la redevance annuelle retenue par la commission. La procédure garantit une égalité de traitement entre les postulants en fondant l’analyse sur des éléments objectifs et connus de tous dès le lancement de la consultation.
II. Les conséquences de l’éviction régulière sur le droit à réparation
A. Le cadre juridique de l’indemnisation fondé sur la perte de chance sérieuse
Lorsqu’une entreprise sollicite la réparation d’un préjudice né de son éviction, le juge doit vérifier si elle était « dépourvue de toute chance de remporter le marché » public. Si l’éviction est irrégulière, le candidat a droit au remboursement des frais de présentation ou à l’indemnisation de son manque à gagner en cas de chance sérieuse. Cette méthodologie de la responsabilité s’applique ici pleinement aux conventions d’occupation du domaine public faisant l’objet d’une mise en concurrence préalable obligatoire par la personne publique. L’indemnisation du manque à gagner inclut nécessairement les frais de présentation de l’offre qui ont été intégrés dans les charges globales de la société candidate à l’exploitation.
B. L’absence de préjudice indemnisable en l’absence de faute de l’administration
En l’espèce, les magistrats considèrent que « la procédure d’attribution n’était pas entachée d’irrégularité » et que le choix de l’attributaire ne constitue pas une erreur manifeste d’appréciation administrative. Puisqu’aucune faute ne peut être reprochée à la personne publique, les conclusions indemnitaires de la société et de ses préposés ne peuvent être que rejetées par le juge. La décision confirme que le droit à réparation est subordonné à la démonstration d’une illégalité fautive ayant directement causé l’éviction du candidat lors de la consultation publique. En l’absence d’irrégularité procédurale, le préjudice invoqué par l’ancien occupant ne présente aucun lien de causalité avec une faute imputable à l’administration ou à l’établissement.