Tribunal judiciaire de Pontoise, le 17 juin 2025, n°24/06163
Rendue par le Tribunal judiciaire de Pontoise le 17 juin 2025, la décision statue sur une action en recouvrement de charges de copropriété engagée contre un copropriétaire défaillant. L’instance a été introduite par assignation du 15 novembre 2024, la défenderesse n’ayant pas constitué avocat. Le syndicat fondait ses demandes sur les appels de provisions, l’approbation des comptes lors des assemblées des 16 juin 2022, 27 juin 2023 et 27 juin 2024, ainsi que sur un relevé individuel détaillé et des mises en demeure. Il sollicitait le paiement de charges, des frais de recouvrement, des dommages et intérêts pour mauvaise foi et une indemnité procédurale. Le tribunal a, après clôture et audience, condamné la défenderesse au paiement d’un solde réévalué et limité les frais imputables, rejetant la demande de dommages et intérêts.
La question tranchée portait, d’une part, sur les conditions d’existence, de certitude et d’exigibilité de la créance de charges à l’issue de l’approbation des comptes et des appels provisionnels. D’autre part, elle concernait l’assiette des frais de recouvrement imputables au seul copropriétaire défaillant au regard de l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965, ainsi que la possibilité d’allouer des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires au titre d’une mauvaise foi alléguée. Le tribunal énonce que « L’obligation à la dette existe, dès lors que l’assemblée générale des copropriétaires a approuvé les comptes présentés par le syndic et qu’aucun recours n’a été formé dans le délai légal ». Il ajoute que « les appels provisionnels […] constituent une créance certaine, liquide et exigible », avant de circonscrire strictement les « frais nécessaires » imputables et de rejeter les dommages et intérêts faute de preuve d’un préjudice distinct. La décision invite ainsi à éclairer le fondement de la créance et le périmètre des accessoires de recouvrement.
I. Le fondement et l’exigibilité de la créance de charges
A. L’effet probatoire de l’approbation des comptes et la naissance de l’obligation Le tribunal rappelle la règle cardinale de l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965 selon laquelle « les copropriétaires sont tenus de participer aux charges […] proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives ». Il en tire la conséquence centrale selon laquelle « L’obligation à la dette existe, dès lors que l’assemblée générale des copropriétaires a approuvé les comptes […] et qu’aucun recours n’a été formé dans le délai légal ». Le contrôle du juge se concentre alors sur la régularité externe et la matérialité des pièces produites, lesquelles comprennent les procès-verbaux d’approbation, les attestations de non-recours et le relevé individuel.
Cette articulation consacre l’effet libératoire de l’approbation des comptes pour le syndicat sur les exercices clos, hors contestation dans les délais. Elle neutralise, dans le cadre du recouvrement, les objections d’opportunité sur l’utilité ou la consistance des dépenses votées, dès lors que la voie de nullité ou de contestation n’a pas été exercée à temps. La solution s’inscrit dans un mouvement jurisprudentiel stabilisé qui dissocie l’assiette votée, sécurisée par l’assemblée, et le recouvrement judiciaire subséquent, centré sur la preuve comptable et l’absence de recours.
B. L’exigibilité des provisions et le point de départ des intérêts Au titre de l’article 35 du décret du 17 mars 1965, le tribunal souligne que « les appels provisionnels auxquels procède le syndic […] constituent une créance certaine, liquide et exigible ». Les bordereaux d’appels et le relevé individuel suffisent, dans ce schéma, à caractériser l’exigibilité des sommes périodiques. Le juge recalcule d’ailleurs le solde dû au vu de ces pièces, pour retenir un montant ajusté reflétant les charges impayées hors frais et les seuls frais récupérables.
Le tribunal assortit la condamnation des intérêts au taux légal à compter d’une mise en demeure antérieure, ce qui s’accorde avec la logique de l’exigibilité des provisions. En retenant une date nette, il consacre un point de départ objectif, cohérent avec les pièces de recouvrement régulièrement notifiées. La créance est ainsi à la fois certaine par l’approbation, liquide par le relevé, et exigible par l’appel provisionnel appuyé d’une mise en demeure.
II. Le cantonnement des frais imputables et des sanctions accessoires
A. La notion de « frais nécessaires » au sens de l’article 10-1 Le jugement opère un tri rigoureux des frais en reprenant les deux régimes successifs du texte, tout en appliquant la logique commune du nécessaire. Il énonce que, pour l’ancien régime, « seuls les frais nécessaires exposés par le syndicat, à compter de la mise en demeure, pour le recouvrement d’une créance justifiée […] sont imputables à ce seul copropriétaire ». Il précise surtout que « N’entrent pas dans les « frais nécessaires » […] les frais de relance du syndic, […] les frais de l’assignation en justice, qui feront l’objet des dépens de l’instance, les frais d’avocat et les relances postérieures à l’assignation ». En miroir, il admet que « doivent être imputés […] le coût de la mise en demeure, les frais d’opposition […] et ceux d’inscription d’hypothèque légale ».
Sous la rédaction issue de 2006, le tribunal confirme que « sont imputables au seul copropriétaire concerné : les frais nécessaires […] notamment les frais de mise en demeure, de relance, de prise d’hypothèque […] ainsi que les droits et émoluments des actes des huissiers ». Il cantonne toutefois l’imputation à hauteur de trois mises en demeure, retenant que « les autres frais [sont] excessifs en ce qu’ils ne sont pas nécessaires […] et l’augmentent artificiellement ». La solution, mesurée, protège l’équilibre entre l’effectivité du recouvrement et la prohibition des surcoûts répétitifs, déjà sanctionnés par la mécanique des dépens.
B. Le refus des dommages et intérêts pour mauvaise foi et l’indemnité procédurale Sur le terrain de l’article 1231-6, alinéa 3, le tribunal rappelle que « le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l’intérêt moratoire ». Il constate cependant l’absence de preuve d’« un préjudice […] distinct de celui compensé par les intérêts moratoires », et rejette la demande. La solution, conforme à l’exigence d’un dommage autonome et certain, évite une double peine économique pour un défaut de paiement déjà sanctionné par les intérêts légaux.
Le juge alloue en revanche une indemnité sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, justifiée par les frais non compris dans les dépens exposés pour contraindre au paiement. Ce cantonnement distingue nettement l’indemnisation de l’effort procédural réellement engagé de la réparation délictuelle, qui suppose une mauvaise foi démontrée et un préjudice spécifique. Il s’inscrit dans une économie contentieuse équilibrée, où l’exécution provisoire de droit rappelle l’impératif de trésorerie propre aux copropriétés.
Rendue par le Tribunal judiciaire de Pontoise le 17 juin 2025, la décision statue sur une action en recouvrement de charges de copropriété engagée contre un copropriétaire défaillant. L’instance a été introduite par assignation du 15 novembre 2024, la défenderesse n’ayant pas constitué avocat. Le syndicat fondait ses demandes sur les appels de provisions, l’approbation des comptes lors des assemblées des 16 juin 2022, 27 juin 2023 et 27 juin 2024, ainsi que sur un relevé individuel détaillé et des mises en demeure. Il sollicitait le paiement de charges, des frais de recouvrement, des dommages et intérêts pour mauvaise foi et une indemnité procédurale. Le tribunal a, après clôture et audience, condamné la défenderesse au paiement d’un solde réévalué et limité les frais imputables, rejetant la demande de dommages et intérêts.
La question tranchée portait, d’une part, sur les conditions d’existence, de certitude et d’exigibilité de la créance de charges à l’issue de l’approbation des comptes et des appels provisionnels. D’autre part, elle concernait l’assiette des frais de recouvrement imputables au seul copropriétaire défaillant au regard de l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965, ainsi que la possibilité d’allouer des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires au titre d’une mauvaise foi alléguée. Le tribunal énonce que « L’obligation à la dette existe, dès lors que l’assemblée générale des copropriétaires a approuvé les comptes présentés par le syndic et qu’aucun recours n’a été formé dans le délai légal ». Il ajoute que « les appels provisionnels […] constituent une créance certaine, liquide et exigible », avant de circonscrire strictement les « frais nécessaires » imputables et de rejeter les dommages et intérêts faute de preuve d’un préjudice distinct. La décision invite ainsi à éclairer le fondement de la créance et le périmètre des accessoires de recouvrement.
I. Le fondement et l’exigibilité de la créance de charges
A. L’effet probatoire de l’approbation des comptes et la naissance de l’obligation
Le tribunal rappelle la règle cardinale de l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965 selon laquelle « les copropriétaires sont tenus de participer aux charges […] proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives ». Il en tire la conséquence centrale selon laquelle « L’obligation à la dette existe, dès lors que l’assemblée générale des copropriétaires a approuvé les comptes […] et qu’aucun recours n’a été formé dans le délai légal ». Le contrôle du juge se concentre alors sur la régularité externe et la matérialité des pièces produites, lesquelles comprennent les procès-verbaux d’approbation, les attestations de non-recours et le relevé individuel.
Cette articulation consacre l’effet libératoire de l’approbation des comptes pour le syndicat sur les exercices clos, hors contestation dans les délais. Elle neutralise, dans le cadre du recouvrement, les objections d’opportunité sur l’utilité ou la consistance des dépenses votées, dès lors que la voie de nullité ou de contestation n’a pas été exercée à temps. La solution s’inscrit dans un mouvement jurisprudentiel stabilisé qui dissocie l’assiette votée, sécurisée par l’assemblée, et le recouvrement judiciaire subséquent, centré sur la preuve comptable et l’absence de recours.
B. L’exigibilité des provisions et le point de départ des intérêts
Au titre de l’article 35 du décret du 17 mars 1965, le tribunal souligne que « les appels provisionnels auxquels procède le syndic […] constituent une créance certaine, liquide et exigible ». Les bordereaux d’appels et le relevé individuel suffisent, dans ce schéma, à caractériser l’exigibilité des sommes périodiques. Le juge recalcule d’ailleurs le solde dû au vu de ces pièces, pour retenir un montant ajusté reflétant les charges impayées hors frais et les seuls frais récupérables.
Le tribunal assortit la condamnation des intérêts au taux légal à compter d’une mise en demeure antérieure, ce qui s’accorde avec la logique de l’exigibilité des provisions. En retenant une date nette, il consacre un point de départ objectif, cohérent avec les pièces de recouvrement régulièrement notifiées. La créance est ainsi à la fois certaine par l’approbation, liquide par le relevé, et exigible par l’appel provisionnel appuyé d’une mise en demeure.
II. Le cantonnement des frais imputables et des sanctions accessoires
A. La notion de « frais nécessaires » au sens de l’article 10-1
Le jugement opère un tri rigoureux des frais en reprenant les deux régimes successifs du texte, tout en appliquant la logique commune du nécessaire. Il énonce que, pour l’ancien régime, « seuls les frais nécessaires exposés par le syndicat, à compter de la mise en demeure, pour le recouvrement d’une créance justifiée […] sont imputables à ce seul copropriétaire ». Il précise surtout que « N’entrent pas dans les « frais nécessaires » […] les frais de relance du syndic, […] les frais de l’assignation en justice, qui feront l’objet des dépens de l’instance, les frais d’avocat et les relances postérieures à l’assignation ». En miroir, il admet que « doivent être imputés […] le coût de la mise en demeure, les frais d’opposition […] et ceux d’inscription d’hypothèque légale ».
Sous la rédaction issue de 2006, le tribunal confirme que « sont imputables au seul copropriétaire concerné : les frais nécessaires […] notamment les frais de mise en demeure, de relance, de prise d’hypothèque […] ainsi que les droits et émoluments des actes des huissiers ». Il cantonne toutefois l’imputation à hauteur de trois mises en demeure, retenant que « les autres frais [sont] excessifs en ce qu’ils ne sont pas nécessaires […] et l’augmentent artificiellement ». La solution, mesurée, protège l’équilibre entre l’effectivité du recouvrement et la prohibition des surcoûts répétitifs, déjà sanctionnés par la mécanique des dépens.
B. Le refus des dommages et intérêts pour mauvaise foi et l’indemnité procédurale
Sur le terrain de l’article 1231-6, alinéa 3, le tribunal rappelle que « le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l’intérêt moratoire ». Il constate cependant l’absence de preuve d’« un préjudice […] distinct de celui compensé par les intérêts moratoires », et rejette la demande. La solution, conforme à l’exigence d’un dommage autonome et certain, évite une double peine économique pour un défaut de paiement déjà sanctionné par les intérêts légaux.
Le juge alloue en revanche une indemnité sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, justifiée par les frais non compris dans les dépens exposés pour contraindre au paiement. Ce cantonnement distingue nettement l’indemnisation de l’effort procédural réellement engagé de la réparation délictuelle, qui suppose une mauvaise foi démontrée et un préjudice spécifique. Il s’inscrit dans une économie contentieuse équilibrée, où l’exécution provisoire de droit rappelle l’impératif de trésorerie propre aux copropriétés.