Cour d’appel de Montpellier, le 1 juillet 2025, n°24/05902
Par un arrêt du 01 juillet 2025, Cour d’appel de Montpellier, chambre commerciale, la juridiction tranche la recevabilité et le sort d’une intervention volontaire accessoire formée par des associés d’une société demanderesse après désistement d’instance et d’action. Le litige naît d’un conflit de direction au sein d’un groupe familial, la société demanderesse ayant initialement assigné un ancien dirigeant et une société concurrente en responsabilité, avant qu’un nouveau représentant ne se désiste de l’instance et de l’action. Des associés interviennent volontairement pour solliciter la désignation d’un mandataire ad hoc, invoquant un conflit d’intérêts et des manœuvres frauduleuses. Par jugement du 04 novembre 2024, tribunal de commerce de Montpellier, l’intervention est déclarée irrecevable, le désistement constaté parfait, et le refus des intervenants de l’accepter jugé abusif. Appel est interjeté le 26 novembre 2024. Devant la cour, les intervenants demandent la nullité du désistement, la désignation d’un mandataire ad hoc et la poursuite de l’instance. Les intimés opposent l’irrecevabilité de l’appel, la caducité de l’intervention accessoire après le désistement et, subsidiairement, l’absence de fondement. La cour énonce d’abord que « Leur appel est recevable. ». Elle retient ensuite que l’intervention est accessoire, mais recevable à raison de l’intérêt propre des intervenants à la conservation de leurs droits. Toutefois, la disparition de l’instance principale par l’effet du désistement entraîne l’extinction de cette intervention. La cour infirme le chef retenant un abus dans le refus d’accepter le désistement, confirme le surplus et statue sur les dépens et l’article 700.
I. La qualification et la recevabilité de l’intervention
A. Le cadre textuel et la méthode de qualification La cour rappelle l’économie des textes applicables en matière d’intervention volontaire. Elle énonce que « L’article 63 du code de procédure civile fait de l’intervention une demande incidente et l’article 66 la définit comme « la demande dont l’objet est de rendre un tiers partie au procès engagé entre les parties originaires ». Cet article précise que lorsque la demande émane du tiers, l’intervention est volontaire ». Elle mobilise ensuite la distinction classique entre intervention principale, qui élève une prétention au profit du tiers, et intervention accessoire, laquelle « appuie les prétentions d’une partie » au sens des articles 329 et 330 du code de procédure civile. Dans cette perspective, la qualification dépend de l’objet exact des prétentions des intervenants, et non de la seule affirmation de leur autonomie.
La juridiction opère la qualification à partir des conclusions procédurales et du but poursuivi. Les intervenants affirmaient représenter l’intérêt social en sollicitant la désignation d’un mandataire ad hoc pour garantir une représentation objective de la société dans l’instance au fond. Ces éléments caractérisent un soutien juridictionnel des prétentions principales, et non une prétention autonome. La cour en tire la conséquence suivante, nette et dépourvue d’ambiguïté: « Il s’agit ainsi d’une intervention volontaire accessoire au sens de l’article 330 du code de procédure civile susmentionné. »
B. Une intervention accessoire néanmoins recevable La cour n’assimile pas l’accessoire à l’irrecevable. Elle précise d’abord la spécificité du filtre d’admission: « La recevabilité de l’intervention accessoire s’apprécie plus souplement que l’intérêt à agir mais elle ne se confond cependant pas avec l’intérêt de la partie soutenue, ni avec un intérêt général. Elle suppose, pour l’intervenant, de caractériser un intérêt pour la conservation de ses droits. » Les intervenants justifiaient d’un intérêt personnel et d’associés, tenant au risque d’atteinte à l’intérêt social et à la préservation de leurs droits face à un conflit d’intérêts allégué. Cet intérêt, distinct de l’intérêt de la société, suffit au regard de l’article 330, alinéa 2.
La cour en déduit deux affirmations complémentaires. D’une part, la voie de l’appel leur est ouverte, ce qu’elle tranche sans détour par « Leur appel est recevable. ». D’autre part, la condition de recevabilité de l’intervention accessoire est satisfaite, d’où la censure du jugement sur ce point: « Les conditions de recevabilité éditées par le deuxième alinéa de l’article 330 du code de procédure civile étant remplies, cette intervention doit être déclarée recevable de sorte que le jugement déféré doit être infirmé sur ce point. » Cette articulation consacre une logique de protection procédurale des tiers intéressés, sans pour autant confondre leur office avec celui du demandeur principal.
II. Les effets du désistement d’instance et d’action et la portée de la solution
A. L’extinction nécessaire de l’intervention accessoire La qualification retenue commande le sort de l’intervention lorsque l’instance principale disparaît. La cour réactive la distinction de nature entre les deux formes d’intervention: « Par suite de leur différence d’objet, le sort de l’intervention principale n’est pas lié à celui de la demande principale, à la différence de l’intervention accessoire. » L’intervention accessoire ne prospère qu’adossée au litige principal. Si ce dernier s’éteint, la logique de l’accessoire s’efface.
La motivation est explicite et s’inscrit dans la continuité d’un précédent de la Cour de cassation: « S’agissant cependant du maintien de cette intervention au regard de l’extinction de l’instance principale (en l’espèce, pour des motifs liés au désistement de la partie soutenue), il sera rappelé la règle selon laquelle la disparition de cette dernière ne peut qu’entraîner la disparition de l’intervention qui ne tend qu’à appuyer les prétentions d’une partie et qui, revêtant un caractère accessoire, est nécessairement liée à la demande originaire (en ce sens Cass. soc., 9 oct. 1986, n°83-45.747, Bull 1986, V, n°488). » Conséquemment, la cour constate l’extinction de l’intervention accessoire et confirme, pour le surplus, la perfection du désistement: « Pour le surplus, notamment en ce qu’elle déclaré parfait le désistement, la décision sera confirmée. » Cette solution maintient une cohérence structurelle: l’accessoire ne peut subsister sans principal.
B. Portée, équilibre des intérêts et voies alternatives La solution, techniquement rigoureuse, ménage toutefois un équilibre. La cour protège l’accès au juge en admettant l’appel et l’intervention accessoire, puis rétablit l’économie procédurale en tirant toutes les conséquences du désistement. En censurant le grief d’abus retenu en première instance, elle rappelle que l’acceptation ou le refus d’un désistement s’apprécie strictement au regard des textes, sans présomption d’intention dilatoire. La correction du chef critiqué évite une stigmatisation des intervenants tout en consacrant la prévisibilité du mécanisme.
Cette décision invite les associés à calibrer la voie procédurale selon l’objectif poursuivi. Lorsque la défense de l’intérêt social nécessite une autonomie de l’instance, l’intervention principale, au besoin combinée avec l’action sociale ut singuli (C. com., art. L. 225-252), pourra neutraliser l’effet extinctif du désistement de la société. À l’inverse, le choix d’une intervention purement accessoire, même recevable, demeure exposé à l’extinction corrélative en cas de disparition du litige principal. La solution préserve une hiérarchie claire des demandes et incite à choisir, en amont, un véhicule procédural adapté au risque de retrait de l’action initiale.
Enfin, la décision clôt les accessoires de procédure avec sobriété. Le dispositif précise qu’il n’y a pas lieu à indemnité au titre des frais irrépétibles, la cour indiquant: « Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, » et répartissant les dépens d’appel à la charge de chacune des parties. L’ensemble produit un équilibre entre la protection de l’initiative des associés et les exigences de cohérence de l’instance, conforme aux textes et à la jurisprudence rappelée.
Par un arrêt du 01 juillet 2025, Cour d’appel de Montpellier, chambre commerciale, la juridiction tranche la recevabilité et le sort d’une intervention volontaire accessoire formée par des associés d’une société demanderesse après désistement d’instance et d’action. Le litige naît d’un conflit de direction au sein d’un groupe familial, la société demanderesse ayant initialement assigné un ancien dirigeant et une société concurrente en responsabilité, avant qu’un nouveau représentant ne se désiste de l’instance et de l’action. Des associés interviennent volontairement pour solliciter la désignation d’un mandataire ad hoc, invoquant un conflit d’intérêts et des manœuvres frauduleuses. Par jugement du 04 novembre 2024, tribunal de commerce de Montpellier, l’intervention est déclarée irrecevable, le désistement constaté parfait, et le refus des intervenants de l’accepter jugé abusif. Appel est interjeté le 26 novembre 2024. Devant la cour, les intervenants demandent la nullité du désistement, la désignation d’un mandataire ad hoc et la poursuite de l’instance. Les intimés opposent l’irrecevabilité de l’appel, la caducité de l’intervention accessoire après le désistement et, subsidiairement, l’absence de fondement. La cour énonce d’abord que « Leur appel est recevable. ». Elle retient ensuite que l’intervention est accessoire, mais recevable à raison de l’intérêt propre des intervenants à la conservation de leurs droits. Toutefois, la disparition de l’instance principale par l’effet du désistement entraîne l’extinction de cette intervention. La cour infirme le chef retenant un abus dans le refus d’accepter le désistement, confirme le surplus et statue sur les dépens et l’article 700.
I. La qualification et la recevabilité de l’intervention
A. Le cadre textuel et la méthode de qualification
La cour rappelle l’économie des textes applicables en matière d’intervention volontaire. Elle énonce que « L’article 63 du code de procédure civile fait de l’intervention une demande incidente et l’article 66 la définit comme « la demande dont l’objet est de rendre un tiers partie au procès engagé entre les parties originaires ». Cet article précise que lorsque la demande émane du tiers, l’intervention est volontaire ». Elle mobilise ensuite la distinction classique entre intervention principale, qui élève une prétention au profit du tiers, et intervention accessoire, laquelle « appuie les prétentions d’une partie » au sens des articles 329 et 330 du code de procédure civile. Dans cette perspective, la qualification dépend de l’objet exact des prétentions des intervenants, et non de la seule affirmation de leur autonomie.
La juridiction opère la qualification à partir des conclusions procédurales et du but poursuivi. Les intervenants affirmaient représenter l’intérêt social en sollicitant la désignation d’un mandataire ad hoc pour garantir une représentation objective de la société dans l’instance au fond. Ces éléments caractérisent un soutien juridictionnel des prétentions principales, et non une prétention autonome. La cour en tire la conséquence suivante, nette et dépourvue d’ambiguïté: « Il s’agit ainsi d’une intervention volontaire accessoire au sens de l’article 330 du code de procédure civile susmentionné. »
B. Une intervention accessoire néanmoins recevable
La cour n’assimile pas l’accessoire à l’irrecevable. Elle précise d’abord la spécificité du filtre d’admission: « La recevabilité de l’intervention accessoire s’apprécie plus souplement que l’intérêt à agir mais elle ne se confond cependant pas avec l’intérêt de la partie soutenue, ni avec un intérêt général. Elle suppose, pour l’intervenant, de caractériser un intérêt pour la conservation de ses droits. » Les intervenants justifiaient d’un intérêt personnel et d’associés, tenant au risque d’atteinte à l’intérêt social et à la préservation de leurs droits face à un conflit d’intérêts allégué. Cet intérêt, distinct de l’intérêt de la société, suffit au regard de l’article 330, alinéa 2.
La cour en déduit deux affirmations complémentaires. D’une part, la voie de l’appel leur est ouverte, ce qu’elle tranche sans détour par « Leur appel est recevable. ». D’autre part, la condition de recevabilité de l’intervention accessoire est satisfaite, d’où la censure du jugement sur ce point: « Les conditions de recevabilité éditées par le deuxième alinéa de l’article 330 du code de procédure civile étant remplies, cette intervention doit être déclarée recevable de sorte que le jugement déféré doit être infirmé sur ce point. » Cette articulation consacre une logique de protection procédurale des tiers intéressés, sans pour autant confondre leur office avec celui du demandeur principal.
II. Les effets du désistement d’instance et d’action et la portée de la solution
A. L’extinction nécessaire de l’intervention accessoire
La qualification retenue commande le sort de l’intervention lorsque l’instance principale disparaît. La cour réactive la distinction de nature entre les deux formes d’intervention: « Par suite de leur différence d’objet, le sort de l’intervention principale n’est pas lié à celui de la demande principale, à la différence de l’intervention accessoire. » L’intervention accessoire ne prospère qu’adossée au litige principal. Si ce dernier s’éteint, la logique de l’accessoire s’efface.
La motivation est explicite et s’inscrit dans la continuité d’un précédent de la Cour de cassation: « S’agissant cependant du maintien de cette intervention au regard de l’extinction de l’instance principale (en l’espèce, pour des motifs liés au désistement de la partie soutenue), il sera rappelé la règle selon laquelle la disparition de cette dernière ne peut qu’entraîner la disparition de l’intervention qui ne tend qu’à appuyer les prétentions d’une partie et qui, revêtant un caractère accessoire, est nécessairement liée à la demande originaire (en ce sens Cass. soc., 9 oct. 1986, n°83-45.747, Bull 1986, V, n°488). » Conséquemment, la cour constate l’extinction de l’intervention accessoire et confirme, pour le surplus, la perfection du désistement: « Pour le surplus, notamment en ce qu’elle déclaré parfait le désistement, la décision sera confirmée. » Cette solution maintient une cohérence structurelle: l’accessoire ne peut subsister sans principal.
B. Portée, équilibre des intérêts et voies alternatives
La solution, techniquement rigoureuse, ménage toutefois un équilibre. La cour protège l’accès au juge en admettant l’appel et l’intervention accessoire, puis rétablit l’économie procédurale en tirant toutes les conséquences du désistement. En censurant le grief d’abus retenu en première instance, elle rappelle que l’acceptation ou le refus d’un désistement s’apprécie strictement au regard des textes, sans présomption d’intention dilatoire. La correction du chef critiqué évite une stigmatisation des intervenants tout en consacrant la prévisibilité du mécanisme.
Cette décision invite les associés à calibrer la voie procédurale selon l’objectif poursuivi. Lorsque la défense de l’intérêt social nécessite une autonomie de l’instance, l’intervention principale, au besoin combinée avec l’action sociale ut singuli (C. com., art. L. 225-252), pourra neutraliser l’effet extinctif du désistement de la société. À l’inverse, le choix d’une intervention purement accessoire, même recevable, demeure exposé à l’extinction corrélative en cas de disparition du litige principal. La solution préserve une hiérarchie claire des demandes et incite à choisir, en amont, un véhicule procédural adapté au risque de retrait de l’action initiale.
Enfin, la décision clôt les accessoires de procédure avec sobriété. Le dispositif précise qu’il n’y a pas lieu à indemnité au titre des frais irrépétibles, la cour indiquant: « Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, » et répartissant les dépens d’appel à la charge de chacune des parties. L’ensemble produit un équilibre entre la protection de l’initiative des associés et les exigences de cohérence de l’instance, conforme aux textes et à la jurisprudence rappelée.