Tribunal judiciaire de Bourgoin-Jallieu, le 17 juin 2025, n°25/00003
Ordonnance du juge des référés du tribunal judiciaire de Bourgoin-Jallieu, 17 juin 2025. Un bail commercial conclu en 2019 a donné lieu à un commandement de payer délivré le 8 septembre 2023 pour 30 569,41 euros. Aucun règlement n’est intervenu dans le mois. Le bailleur a saisi le juge des référés pour voir constater l’acquisition de la clause résolutoire, obtenir l’expulsion, une provision chiffrée à 47 322,52 euros et une indemnité d’occupation. Le preneur a opposé des contestations sérieuses, principalement relatives à une différence de superficie alléguée, et a sollicité à titre subsidiaire la suspension de la clause résolutoire et des délais de paiement.
La contestation s’articule autour d’une expertise amiable non contradictoire faisant état de 111,73 m², contre 128 m² stipulés. Le bail comporte une stipulation selon laquelle « toute différence entre les cotes et surfaces mentionnées au présent bail ou résultant du plan […] ne saurait justifier une réduction ou augmentation de loyer ». Le preneur invoque un manquement à l’obligation de délivrance et la mauvaise foi contractuelle. Le bailleur soutient la régularité du commandement et l’exigibilité des loyers trimestriels. Deux thèses se confrontent ainsi sur l’étendue de l’obligation et l’office du juge des référés.
La question posée tient à l’articulation des articles 834 et 835 du code de procédure civile avec l’article L. 145-41 du code de commerce: le juge des référés peut-il constater l’acquisition d’une clause résolutoire et ordonner l’expulsion lorsque le principe de la dette n’est pas contesté, tout en refusant une provision si le quantum demeure sérieusement discuté?
Le juge rappelle d’abord que « Dans tous les cas d’urgence, […] [il] peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend. […] [Il] peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire […] les mesures […] qui s’imposent […] pour faire cesser un trouble manifestement illicite. » Il ajoute que, selon l’article 835, « dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, [il peut] accorder une provision ». Appliquant ces textes, il énonce: « Le bail liant les parties comporte une clause résolutoire applicable en cas de non paiement des loyers, un mois après délivrance d’un commandement de payer », puis retient que « Le paiement des loyers trimestiels ne peut être contesté en son principe ; dès lors, il convient de constater que la clause résolutoire […] produit ses effets et que le bail s’est trouvé résilié de plein droit à la date du 8 octobre 2023 ». Le maintien dans les lieux « constitue un trouble manifestement illicite » justifiant l’expulsion. En revanche, « au regard des contestations quant à la superficie du local commercial et quant au montant du loyer, la créance peut être contestable en son montant, la clause insérée dans le bail pouvant être discutée ; dès lors, les parties seront renvoyés à mieux se pouvoir ».
I. La constatation de la clause résolutoire et l’expulsion en référé
A. Des conditions d’acquisition non sérieusement contestées Le juge retient la réunion des conditions de l’article L. 145-41: commandement régulier, écoulé d’un mois, impayés persistants. La formule « Le paiement des loyers trimestiels ne peut être contesté en son principe » fixe le périmètre du débat. Le principe de l’obligation n’étant pas discuté utilement, l’acquisition de la clause résolutoire s’impose, sans préjudice d’un débat ultérieur sur le montant exact de la dette.
Cette appréciation s’inscrit dans une jurisprudence constante: en référé, la clause résolutoire est acquise si son déclenchement n’est pas sérieusement contesté. Le juge n’anticipe pas le fond; il vérifie l’effectivité d’un mécanisme légalement encadré, dont la mise en œuvre résulte d’un commandement demeuré infructueux.
B. Le trouble manifestement illicite et la mesure d’expulsion La décision articule les pouvoirs de l’article 834 avec l’état né de la résiliation: l’occupation sans droit ni titre. La motivation est nette: « Le maintien dans les lieux […] constitue un trouble manifestement illicite », auquel il convient de mettre fin. L’expulsion apparaît comme une mesure de remise en état, proportionnée et immédiatement exigible.
La solution respecte l’office du juge des référés. Même en présence d’une contestation sérieuse sur le quantum, le trouble lié à l’occupation irrégulière peut être cessé. L’ordonnance ne préjuge pas le fond; elle rétablit l’ordre contractuel après l’acquisition constatée de la clause.
II. La limitation des mesures pécuniaires et le débat sur la superficie
A. Le refus de provision face à une contestation sérieuse du quantum Le juge rappelle que l’article 835 exige une obligation « non […] sérieusement contestable » pour allouer une provision. Il relève des éléments précis sur la superficie: une expertise amiable non contradictoire, un écart allégué de 13 %, et une clause de neutralisation des écarts. D’où la formule: « la créance peut être contestable en son montant, la clause insérée dans le bail pouvant être discutée ; dès lors, les parties seront renvoyés à mieux se pouvoir ».
Ce raisonnement illustre la frontière classique entre principe et montant. L’exigibilité des loyers et charges ne souffre pas de doute, mais l’assiette du loyer peut dépendre de la surface louée et de la portée d’une stipulation contractuelle. En pareille hypothèse, la provision serait prématurée; le renvoi au fond permet l’instruction contradictoire, notamment une expertise judiciaire.
B. Clauses de surface, obligation de délivrance et portée pratique La clause selon laquelle « toute différence entre les cotes et surfaces […] ne saurait justifier une réduction ou augmentation de loyer » n’éteint pas toute discussion. Le juge souligne qu’elle « peut être discutée ». En droit des baux commerciaux, l’obligation de délivrance commande un local conforme à la destination convenue; un écart significatif peut, selon les circonstances, affecter la valeur locative ou ouvrir droit à réparation.
La portée de l’ordonnance est opérationnelle. Côté bailleur, elle confirme l’utilité du référé pour constater la clause résolutoire et mettre fin rapidement à l’occupation irrégulière. Côté preneur, elle rappelle qu’une contestation sérieuse et étayée du quantum, fondée sur la superficie réelle, peut faire obstacle à l’allocation d’une provision. La rédaction des baux doit, en pratique, clarifier la méthode de détermination de la surface et l’incidence d’éventuels écarts, afin de sécuriser le loyer convenu tout en réduisant le risque contentieux.
Ordonnance du juge des référés du tribunal judiciaire de Bourgoin-Jallieu, 17 juin 2025. Un bail commercial conclu en 2019 a donné lieu à un commandement de payer délivré le 8 septembre 2023 pour 30 569,41 euros. Aucun règlement n’est intervenu dans le mois. Le bailleur a saisi le juge des référés pour voir constater l’acquisition de la clause résolutoire, obtenir l’expulsion, une provision chiffrée à 47 322,52 euros et une indemnité d’occupation. Le preneur a opposé des contestations sérieuses, principalement relatives à une différence de superficie alléguée, et a sollicité à titre subsidiaire la suspension de la clause résolutoire et des délais de paiement.
La contestation s’articule autour d’une expertise amiable non contradictoire faisant état de 111,73 m², contre 128 m² stipulés. Le bail comporte une stipulation selon laquelle « toute différence entre les cotes et surfaces mentionnées au présent bail ou résultant du plan […] ne saurait justifier une réduction ou augmentation de loyer ». Le preneur invoque un manquement à l’obligation de délivrance et la mauvaise foi contractuelle. Le bailleur soutient la régularité du commandement et l’exigibilité des loyers trimestriels. Deux thèses se confrontent ainsi sur l’étendue de l’obligation et l’office du juge des référés.
La question posée tient à l’articulation des articles 834 et 835 du code de procédure civile avec l’article L. 145-41 du code de commerce: le juge des référés peut-il constater l’acquisition d’une clause résolutoire et ordonner l’expulsion lorsque le principe de la dette n’est pas contesté, tout en refusant une provision si le quantum demeure sérieusement discuté?
Le juge rappelle d’abord que « Dans tous les cas d’urgence, […] [il] peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend. […] [Il] peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire […] les mesures […] qui s’imposent […] pour faire cesser un trouble manifestement illicite. » Il ajoute que, selon l’article 835, « dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, [il peut] accorder une provision ». Appliquant ces textes, il énonce: « Le bail liant les parties comporte une clause résolutoire applicable en cas de non paiement des loyers, un mois après délivrance d’un commandement de payer », puis retient que « Le paiement des loyers trimestiels ne peut être contesté en son principe ; dès lors, il convient de constater que la clause résolutoire […] produit ses effets et que le bail s’est trouvé résilié de plein droit à la date du 8 octobre 2023 ». Le maintien dans les lieux « constitue un trouble manifestement illicite » justifiant l’expulsion. En revanche, « au regard des contestations quant à la superficie du local commercial et quant au montant du loyer, la créance peut être contestable en son montant, la clause insérée dans le bail pouvant être discutée ; dès lors, les parties seront renvoyés à mieux se pouvoir ».
I. La constatation de la clause résolutoire et l’expulsion en référé
A. Des conditions d’acquisition non sérieusement contestées
Le juge retient la réunion des conditions de l’article L. 145-41: commandement régulier, écoulé d’un mois, impayés persistants. La formule « Le paiement des loyers trimestiels ne peut être contesté en son principe » fixe le périmètre du débat. Le principe de l’obligation n’étant pas discuté utilement, l’acquisition de la clause résolutoire s’impose, sans préjudice d’un débat ultérieur sur le montant exact de la dette.
Cette appréciation s’inscrit dans une jurisprudence constante: en référé, la clause résolutoire est acquise si son déclenchement n’est pas sérieusement contesté. Le juge n’anticipe pas le fond; il vérifie l’effectivité d’un mécanisme légalement encadré, dont la mise en œuvre résulte d’un commandement demeuré infructueux.
B. Le trouble manifestement illicite et la mesure d’expulsion
La décision articule les pouvoirs de l’article 834 avec l’état né de la résiliation: l’occupation sans droit ni titre. La motivation est nette: « Le maintien dans les lieux […] constitue un trouble manifestement illicite », auquel il convient de mettre fin. L’expulsion apparaît comme une mesure de remise en état, proportionnée et immédiatement exigible.
La solution respecte l’office du juge des référés. Même en présence d’une contestation sérieuse sur le quantum, le trouble lié à l’occupation irrégulière peut être cessé. L’ordonnance ne préjuge pas le fond; elle rétablit l’ordre contractuel après l’acquisition constatée de la clause.
II. La limitation des mesures pécuniaires et le débat sur la superficie
A. Le refus de provision face à une contestation sérieuse du quantum
Le juge rappelle que l’article 835 exige une obligation « non […] sérieusement contestable » pour allouer une provision. Il relève des éléments précis sur la superficie: une expertise amiable non contradictoire, un écart allégué de 13 %, et une clause de neutralisation des écarts. D’où la formule: « la créance peut être contestable en son montant, la clause insérée dans le bail pouvant être discutée ; dès lors, les parties seront renvoyés à mieux se pouvoir ».
Ce raisonnement illustre la frontière classique entre principe et montant. L’exigibilité des loyers et charges ne souffre pas de doute, mais l’assiette du loyer peut dépendre de la surface louée et de la portée d’une stipulation contractuelle. En pareille hypothèse, la provision serait prématurée; le renvoi au fond permet l’instruction contradictoire, notamment une expertise judiciaire.
B. Clauses de surface, obligation de délivrance et portée pratique
La clause selon laquelle « toute différence entre les cotes et surfaces […] ne saurait justifier une réduction ou augmentation de loyer » n’éteint pas toute discussion. Le juge souligne qu’elle « peut être discutée ». En droit des baux commerciaux, l’obligation de délivrance commande un local conforme à la destination convenue; un écart significatif peut, selon les circonstances, affecter la valeur locative ou ouvrir droit à réparation.
La portée de l’ordonnance est opérationnelle. Côté bailleur, elle confirme l’utilité du référé pour constater la clause résolutoire et mettre fin rapidement à l’occupation irrégulière. Côté preneur, elle rappelle qu’une contestation sérieuse et étayée du quantum, fondée sur la superficie réelle, peut faire obstacle à l’allocation d’une provision. La rédaction des baux doit, en pratique, clarifier la méthode de détermination de la surface et l’incidence d’éventuels écarts, afin de sécuriser le loyer convenu tout en réduisant le risque contentieux.